La dialectique du maître… et du boy
Publié le 7 juillet 2008 Lecture : 1 minute.
Paris, 18e arrondissement, au coeur du quartier populaire de la Goutte-d’Or, coincé entre le boulevard Barbès et le boulevard de la Chapelle, une façade vert pomme détonne, celle du Lavoir moderne parisien, qui accueille, jusqu’au 12 juillet, Maître Harold (Master Harold and the Boys), du Sud-Africain Athol Fugard. Né au Cap, en 1932, d’un père irlandais catholique et d’une mère afrikaner, Fugard a fait des rapports interculturels l’un des thèmes récurrents de son oeuvre. À la tête d’une compagnie de comédiens noirs, les Serpent Players, qui se produisait dans les townships, l’auteur de Sizwe Banzi est mort (1972) a construit un théâtre de contestation et d’avant-garde, et n’a cessé de lutter contre le régime de l’apartheid.
Créée en 1982, Maître Harold revient sur la problématique raciale. Sans manichéisme. Entre deux pas de fox-trot, Sam (interprété avec intelligence par le Togolais Beno K. Sanvee) et Willie (Hassane Kassi Kouyaté), deux boys noirs d’un salon de thé, partagent les heurs et malheurs de Harold (Julien Favart), le fils blanc de leurs employeurs. Mais leurs rapports amicaux, voire filiaux, sont constamment menacés par une société sud-africaine qui ne saurait tolérer une telle proximité entre Noirs et Blancs. Les doux rêves de Sam, qui voudrait que le jeune Harold « apprenne à danser la vie » pour que celle-ci lui soit plus légère, ne sont guère compatibles avec les conventions sociales en vigueur.
Le Burkinabè Hassane Kassi Kouyaté a su s’adapter avec ingéniosité aux charmes des murs de brique et des poutres apparentes de la scène du Lavoir. Sa mise en scène rythmée swingue. La scénographie se fait chorégraphie. Et parviendrait presque à compenser les bafouillages de Julien Favart, que le jeu de Kouyaté et de Sanvee efface quelque peu. Mais les répliques fusent, les silences s’entrechoquent et mettent au jour toute l’intensité dramatique que recèle la pièce. Indéniablement, Maître Harold ne laissera pas indifférent.
