Il y a un siècle déjà

Publié le 7 juillet 2008 Lecture : 2 minutes.

L’idée d’une « Union méditerranéenne » ne date pas d’aujourd’hui. Depuis un siècle, elle a ses défenseurs zélés, dont certains sont passés à la trappe de l’Histoire, hélas ! Tel ce couple d’artistes franco-italien, Valentine de Saint-Point et Ricciotto Canudo, à l’origine d’un projet de « Confédération méditerranéenne », en 1907 déjà ! Elle, c’est l’arrière-petite-nièce de Lamartine, égérie du futurisme et auteur d’ouvrages sulfureux, dont le Manifeste de la luxure. Lui est écrivain et poète, inventeur de l’expression « septième art » pour le cinéma et auteur de livres à la teneur mystique. Tous deux proposent de lancer une « Confédération méditerranéenne », appelée ailleurs « Frairie méditerranéenne » ou « Fédération spirituelle des intelligences méditerranéennes ». En 1920, Canudo illustre son propos à Rome par une série de conférences sur « l’idée et l’action méditerranéennes » avant de passer la main à Valentine de Saint-Point. En 1921, celle-ci s’installe à Ajaccio et reprend le concept sous la forme d’un « Collège des élites » voué à « la formation de l’esprit méditerranéen » et où « Orientaux et Occidentaux prépareront ensemble la civilisation méditerranéenne à venir ». De fait, acquise et bientôt convertie à l’islam, l’arrière-petite-nièce de Lamartine estime que, « privé de spiritualité, l’Occident utilise ses sciences à la destruction et vit à l’extérieur, et que, privé des qualités occidentales d’exactitude, l’Orient se replie à l’intérieur, épuise ses forces sans se renouveler ». Solution ? « L’un avec l’autre conjugueront sagesse millénaire et découvertes scientifiques, trouveront des points de rencontre pour créer une culture commune et éduquer les générations nouvelles à l’idée de coopération » (sic).
On l’aura compris, nous n’avons pas affaire à des politiques ou à des théoriciens chevronnés, mais à une frange d’intellectuels rêveurs. N’empêche, c’est à eux que nous devons les premiers discours fondateurs de l’idée méditerranéenne. Si le projet du couple Canudo – Saint-Point invoque une « urgence spirituelle et morale » provoquée par un premier conflit mondial générateur d’une « crise universelle », il n’aspire pas moins à « concilier les civilisations » et à réclamer « un échange égal entre les deux rives ».
Guère pris au sérieux par leurs contemporains, Ricciotto et Valentine jetteront l’éponge. L’Italien mourra en 1923 des suites de ses blessures de guerre. Valentine s’installera en Égypte, où elle tentera en vain de relancer son projet à partir du monde arabe. Elle mourra en 1953, musulmane et méditerranéenne convaincue.

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