Du bon usage de la démocratie
Le 3 juillet, deux mois après sa nomination, le Premier ministre mauritanien Yahya Ould Ahmed el-Waghf a démissionné. Immédiatement reconduit par Sidi Ould Cheikh Abdallahi, il a été chargé de former un nouveau gouvernement, dont la composition ne devrait pas être connue avant le 7 juillet. Ce rapide tour de passe-passe est l’aboutissement d’une saga parlementaire qui a commencé avec le remaniement du 11 mai. Pour un nombre croissant de députés de la majorité, membres pour la plupart du parti soutenant le chef de l’État, le Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD), la nouvelle équipe est incapable de résoudre la crise économique que traverse le pays. Les mêmes dénoncent aussi la présence des « symboles de la gabegie » dans le gouvernement : l’expression désigne les caciques qui ont aidé l’ex-président Maaouiya Ould Taya, déchu le 3 août 2005, à instaurer un système vicié par la corruption, le tribalisme et le népotisme. D’autres, comme Naha Mint Mouknass, présidente de l’Union pour la démocratie et le progrès (UDP), s’estiment lésés, n’ayant obtenu aucun ministère quand l’Union des forces de progrès (UFP) et le Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD), jusqu’alors dans l’opposition, ont respectivement raflé trois et deux maroquins.
Des griefs qui, pour la présidence, ne sont que des prétextes destinés à affaiblir le chef de l’État. Impatients de s’adonner au nouveau jeu de la démocratie, les députés finissent par déposer une motion de censure, le 30 juin. Le texte est signé par trente-neuf frondeurs, que s’engage à rejoindre le Rassemblement des forces démocratiques (RFD), le parti d’opposition le mieux représenté à l’Assemblée. La motion a donc toutes les chances d’être votée, et le gouvernement d’être limogé : un précédent dans une Mauritanie où les députés n’ont jamais été que de jolies marionnettes.
Pour anticiper l’affront, le chef de l’État menace les « mutins », dans un discours télévisé, de dissoudre l’Assemblée. Finalement, le jour pressenti pour le vote, le Premier ministre présente sa démission, rendant la motion caduque. En composant le nouveau gouvernement, Yahya devra calmer les appétits des députés et, peut-être, satisfaire les hauts gradés de l’armée. Il se murmure en effet que ces derniers, habitués à gouverner jusqu’à l’élection de « Sidi » (mars 2007), auraient encouragé la fronde afin de regagner une influence politique qui s’amenuise.
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