Pays développés en panne

Publié le 7 juillet 2003 Lecture : 3 minutes.

Le phénomène s’étend. Le Japon a été le premier touché. Plus récemment, l’Europe occidentale dans sa partie continentale, l’Allemagne au premier rang, suivie de la France ; désormais, c’est le tour des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de Singapour et de Hong Kong, pour ne citer que les cas les plus éclairants. Ces champions du développement économique paraissent en panne de croissance.

Les raisons abondamment citées : dégonflement de bulles spéculatives, absence ou insuffisance des remodelages d’économies devenues trop rigides. Tout en reconnaissant le bien-fondé de celles-ci et en prenant en compte la spécificité de chaque situation, on peut noter qu’elles ne suffisent pas à expliquer un phénomène qui se généralise.
Des secteurs entiers de l’industrie japonaise sont soumis, depuis plusieurs années, à des restructurations profondes, sans effet visible sur le volume de l’activité économique, cependant que le chômage progresse. Les nouvelles capacités de production sont, pour l’essentiel, crées hors du Japon, souvent en Chine. À Hong Kong, à Singapour, l’économie stagne, et le chômage a fait son apparition.

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L’Allemagne semble ne plus en finir d’achever son unification. Mois après mois, elle perd des emplois et elle ne parvient pas à dynamiser sa production. Sans avoir le même problème de base à résoudre, la France est confrontée à des fermetures d’usines, à des réductions d’effectifs et à la quasi-stagnation de son économie. Avec un certain décalage dans le temps, d’autres pays européens de l’Ouest se trouvent dans des situations analogues. Quiconque suit les indicateurs des États-Unis constate que les pertes d’activité des industries manufacturières s’additionnent mois après mois et remettent en question les perspectives de reprise d’une économie pourtant stimulée par les voies monétaire et budgétaire.
Quels sont aujourd’hui les pays qui enregistrent des taux de croissance significatifs ? La Chine, au premier plan, suivie de l’Inde, deux pays aux inépuisables réserves de main-d’oeuvre de plus en plus activement menées par des minorités éduquées et dynamiques. Grands exportateurs, ils constituent aussi d’immenses marchés potentiels de consommation. Ce n’est pas un hasard s’ils reçoivent un flux croissant d’investissements en provenance de l’extérieur, la Chine ayant supplanté les États-Unis au premier plan des bénéficiaires de capitaux étrangers. Dans le groupe des pays en expansion notable figurent la plupart des anciens satellites de l’Union soviétique, promis à une prochaine entrée dans l’Union européenne. Ils bénéficient d’une population assez largement éduquée, dynamique et qui aspire à consommer.

La globalisation de l’économie mondiale est à l’oeuvre. Selon le point de vue, on peut le regretter si on perd son emploi, ou s’en féliciter si on en gagne un. Elle est un facteur de progrès dans la mesure où elle étend à de nouvelles couches de population le bienfait d’un niveau de vie meilleur.
La dynamique est lancée ; elle ne pourrait être stoppée que par une vigoureuse réaction protectionniste de la part des pays les plus avancés. La tentation sera d’autant plus forte que les remises en question d’emplois et des acquis sociaux se multiplieront et s’accélèreront dans les pays heurtés par la concurrence émanant de pays aux coûts de production plus bas. Si elle s’imposait, elle entraînerait un chaos politique et économique généralisé. Soyons lucides. Dans des pays occidentaux comme la France et l’Allemagne, l’État coûte trop cher, et les rémunérations et les coûts sociaux, jamais trop élevés dans l’absolu, peuvent l’être en termes relatifs lorsqu’ils conduisent à des pertes d’emplois. La collectivité peut parfois atténuer certaines différences lorsqu’elles sont limitées et circonscrites. Elle se mettrait en péril elle-même à s’engager au-delà de ce qu’elle peut assumer.
La solution consiste en la lutte continue contre des priorités désormais injustifiées, des modes opérationnels dépassés, en la recherche de l’innovation dans les produits, les techniques et le savoir-faire. L’avantage des États-Unis sur le Japon et sur l’Europe est qu’ils sont plus préparés qu’eux à se remettre en question et à faire face aux défis de notre temps.

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