Mourir en jouant

Publié le 7 juillet 2003 Lecture : 3 minutes.

Marc-Vivien Foé est mort subitement au stade Gerland, à Lyon, le 26 juin dernier. Comme meurent chaque année en France environ mille sportifs, jeunes ou vieux, amateurs pour la plupart, plutôt mal surveillés. La mort subite du sportif (MSS) représente de 3 % à 5 % de l’ensemble des morts subites.
La mort d’un sportif connu, retransmise en direct à la télévision, suscite une immense émotion. Car l’effort est magnifié aujourd’hui comme un symbole de vitalité. Ces morts subites se sont multipliées depuis une trentaine d’années avec l’augmentation du nombre de sportifs et l’attrait de la victoire (et de l’argent), qui a conduit à des efforts plus intenses et fréquents. Les MSS ont suscité des centaines de travaux de recherche. Même si la définition de cette mort reste hésitante. Pour beaucoup, il s’agit du décès se produisant dans l’heure qui suit un malaise inattendu chez un sportif considéré comme indemne de toute maladie. Pour l’Organisation mondiale de la santé, le délai est de six heures.

Les recherches ont montré que la MSS est dix fois plus fréquente chez les sportifs non entraînés que chez les entraînés. Des examens autopsiques ont aussi permis de déterminer les principales causes de MSS.
Dans 85 % des cas, il s’agit de maladies cardiaques. Chez les moins de 35 ans, ce sont le plus souvent des maladies du muscle cardiaque (myocarde) lui-même qui est hypertrophié ou de structure anormale (cardiomyopathie obstructive ou dysplasie). Mais aussi des anomalies congénitales des artères coronaires (artères qui nourrissent le myocarde), voire, plus rarement, de la structure cardiaque. Ou des maladies des valves du coeur, qui n’assurent plus la progression normale du sang. Ou encore des inflammations aiguës du myocarde au cours de maladies infectieuses méconnues (viroses). Chez les plus de 35 ans, la cause la plus fréquente est l’athérosclérose coronaire qui conduit à l’infarctus. À tous les âges peuvent être en cause des anomalies du rythme cardiaque ou de la conduction de l’influx contractile dans le coeur. Quelle que soit la maladie, elle entraîne souvent un trouble terminal : la fibrillation ventriculaire (FV). À ce moment, le malade ne peut être sauvé que par une défibrillation pratiquée dans les dix minutes.

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Dans 10 % des cas, il s’agit de causes non cardiaques : ruptures d’artères avec hémorragie cérébrale, thoracique ou abdominale. Elles concernent des artères anormales : dilatées, malformées ou enflammées. Dans 5 % des cas, l’autopsie ne montre aucune anomalie. La mort peut alors être due à un spasme temporaire fermant une artère vitale, ou à une FV déclenchée par un « orage » nerveux lié au stress, à l’engagement physique et psychologique. Parfois, les examens biologiques permettent de trouver des produits dopants.

La MSS peut être favorisée par le tabagisme, la température très élevée, un échauffement insuffisant ou un effort exceptionnellement intense. La prévention de la MSS nécessite une surveillance médicale attentive, dont tout sportif professionnel devrait bénéficier. Ainsi, un examen cardiologique complet devrait être réalisé tous les six mois : examen clinique attentif, électrocardiogramme, échocardiogramme, épreuves d’effort. La surveillance doit aussi être biologique avec, dans la population noire, la recherche des hémoglobines anormales (symptomatiques de la drépanocytose). Pour tout cela, il convient de connaître les antécédents médicaux personnels et familiaux (cas d’hypertension, d’hypercholestérolémie, de morts subites). Réalisés en début de carrière sportive, ces examens conduisent à éliminer de 2 % à 5 % des candidats.
Prévenir la MSS, c’est aussi éduquer le sportif à ne pas dissimuler des signes, si minimes soient-ils : diarrhée, fièvre, palpitations, douleur thoracique, malaise à l’effort. La compétition doit alors être interrompue jusqu’à ce que le diagnostic soit précisé.
Le sport est certes une activité à la mode, mais la MSS nous rappelle qu’il n’est pas sans danger et doit être stoppé lorsque c’est nécessaire. Ce qui n’empêche pas et favorise même les bons résultats.

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