Momo la Gouaille

Publié le 8 juillet 2003 Lecture : 2 minutes.

L’expression raciste qui donne son titre au film n’est évidemment pas à prendre au premier degré. Même si le réalisateur l’a entendu proférer sans recul ni ironie, il y a quelques années. Elle sortait de la bouche d’un expert venu vérifier à son domicile, dans le sud-est de la France, un système de chauffage au gaz défectueux qu’il n’arrivait pas à faire réparer. C’est alors qu’a germé dans son esprit l’idée de ce long-métrage.
À l’écran, c’est aussi un expert qui ne peut s’empêcher de s’écrier « travail d’Arabe ! » quand un apprenti ouvrier, Momo, lui montre à quoi ressemble le chauffage central réalisé par l’entreprise des frères Gutti chez une vieille dame morte de façon suspecte, sans doute à cause d’émanations de gaz. Momo, le héros du film, sait de quoi il parle : il vient de quitter, sans être payé, son emploi précaire et non déclaré chez les frères Gutti, des chauffagistes très sûrs d’eux – « Chez Gutti, il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des solutions ! » -, mais dont les méthodes de travail le scandalisaient.
Momo, qui parle avec un fort accent méridional, fait savoir à qui veut l’entendre qu’il est un pur Provençal. Mais, comme on s’en doute, son véritable prénom est Mohamed et son visage trahit son ascendance maghrébine… qu’il ne peut s’empêcher de revendiquer à toute occasion. Notamment en s’offusquant quand on parle de « travail d’Arabe » pour évoquer des malfaçons attribuables à de « purs » autochtones.
Que ce soit ce délinquant gouailleur et paresseux qui se retrouve, par désir de vengeance, dans la peau d’un redresseur de torts – combattant antiraciste, défenseur des vieilles dames et pourfendeur des petits patrons -, voilà qui a de quoi surprendre. Et qu’en définitive le personnage le plus antipathique ne soit pas l’un des frères Gutti, mais leur responsable commercial, un vulgaire frimeur tout dévoué à ses chefs qui s’y croit parce qu’il a séjourné aux États-Unis et roule en voiture de sport, voilà qui n’était pas donné d’avance.
C’est justement parce qu’il suit le parcours de personnages aussi vrais que nature, où même les plus sympathiques sont pleins de défauts, que ce film sans prétention, drôle et riche en rebondissements, est des plus attachant. Il peut aussi bien se regarder comme une fantaisie humaniste décapante que comme un documentaire tragi-comique dénonçant les pratiques des puissants de la « France d’en bas ». Comme, même si la comparaison est flatteuse, dans les meilleurs films de Ken Loach.

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