Un diplomate rusé et coriace

Publié le 7 juin 2004 Lecture : 2 minutes.

Que diable va-t-il donc faire dans cette galère ? Telle a été la réaction d’une collègue avec qui j’ai travaillé, il y a une dizaine d’années, en Haïti, à l’annonce, il y a quelques mois, de la nomination de Lakhdar Brahimi comme représentant spécial de l’ONU en Irak. L’interrogation était compréhensible et légitime, surtout dans une affaire dans laquelle la communauté internationale a été tenue pour quantité négligeable. Mais c’était mal connaître ce diplomate chevronné, pragmatique, rusé, coriace et, bien souvent, efficace, que certains avaient un peu trop vite inscrit à la Caisse des retraites des Nations unies après son départ d’Afghanistan, en janvier 2004.

Compagnon d’aventure de l’ONU sur plusieurs théâtres de conflit, Brahimi, avec qui j’ai eu le plaisir de travailler en Haïti et en Afrique du Sud, n’est pas homme à se défausser, ni à refuser de servir la cause de la paix, même dans un pays où il risquait gros, en tant qu’Arabe, et où il a perdu, en 2003, un collègue et ami, Sergio Vieira de Mello, alors considéré comme l’un des fonctionnaires les plus brillants des Nations unies. Encore faudrait-il ne pas lui demander d’abdiquer toute conviction. Et Dieu sait qu’il en est pétri.

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Tout au long de sa carrière onusienne, Brahimi a pratiqué le don de lui-même, comme d’autres font la guerre. Mais avec discrétion, et non sans jubilation. Après avoir « fait », notamment, le Yémen, le Liban, l’Afghanistan, le Soudan, la République démocratique du Congo, Haïti, l’Afrique du Sud, il a donc accepté, à la suite d’amicales pressions et sans doute après avoir pris quelques précautions, de reprendre brièvement du service en Irak occupé. Au risque d’apparaître aux yeux des siens et d’une partie de l’opinion des pays en voie de développement comme le pompier d’une Amérique conservatrice et belliqueuse, sinon comme une bouée de sauvetage pour un « Gulliver empêtré » dans une crise dont ni l’ONU ni lui n’ont jamais voulu. Mais l’Algérien au visage doux et chaleureux, l’ancien représentant du FLN en Indonésie, l’épigone de Mandela, a accepté de prendre le pari, d’aller au casse-pipe sans, semble-t-il, avoir rien renié de ses idées. Certains l’apprennent aujourd’hui à leurs dépens.

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