Retour vers l’or

Laissés aux mains des artisans depuis la fin des années 1990, les gisements aurifères suscitent un regain d’intérêt des multinationales.

Publié le 7 mai 2007 Lecture : 4 minutes.

Le 26 mars dernier ont été lancés les travaux d’aménagement d’une mine de zinc à proximité de Perkoa, dans le centre du pays. La réalisation des infrastructures nécessaires à l’exploitation du site se déroulera sur plusieurs mois, et l’entrée en activité de la mine est prévue pour juillet 2008. C’est la société australienne Nantou Mining qui en sera l’opérateur. Selon le ministère des Mines, avec des réserves estimées à plus de 6,27 millions de tonnes de minerai, l’exploitation devrait durer dix-sept ans, à raison de 160 tonnes de zinc produites par an. La mise en valeur de Perkoa devrait rapporter à l’État environ 37,8 milliards de F CFA par an (plus de 57 millions d’euros) au titre des redevances minières et des impôts. En outre, l’activité suscitée par cette mine devrait se traduire par la création de 500 emplois. Pour la province du Sanguié, ce projet devrait permettre de développer les équipements collectifs, notamment les infrastructures routières, sanitaires et scolaires.
Confrontées à la baisse régulière des cours mondiaux du coton, les autorités ont donc décidé de mettre l’accent sur la relance des activités minières. D’autant que, après avoir connu un net ralentissement à la suite de la chute des prix de certains métaux, les gisements burkinabè attisent de nouveau la convoitise des opérateurs internationaux. Principales concernées, les mines d’or, qui redeviennent rentables grâce à la remontée spectaculaire des prix observée depuis cinq ans. Entre 1998 et 2001, le métal jaune a connu une sérieuse dépression, le cours de l’once stagnant en dessous des 300 dollars. À la fin de l’année 2006, celle-ci s’échangeait plus de 600 dollars, dopée par une demande mondiale très soutenue. Les prix ont donc doublé en l’espace de cinq ans.
Ainsi, à la fin de l’année 2006, la compagnie canadienne High River Gold a débuté l’aménagement d’un important gisement d’or à Tafarko, dans le nord du pays, sur un site dont les réserves sont estimées à plus de 7 millions de tonnes de minerai. La Société des mines de Tafarko (Somita), détenue à 90 % par High River Gold et à 10 % par l’État burkinabè, table sur une durée d’exploitation de sept ans et compte bien couler son premier lingot avant la fin de l’année.
Plus récemment, la société canadienne Semafo a obtenu le 23 février un permis d’exploitation du gisement de Mana (Centre-Ouest), dont les réserves sont estimées à plus de 7,1 millions de tonnes. Son exploitation, prévue pour durer sept ans, rapportera à l’État 13,8 milliards de F CFA (21 millions d’euros) au titre des redevances et de l’impôt sur les bénéfices. L’aménagement du site et l’achat des équipements vont mobiliser quelque 35 milliards de F CFA d’investissement. Début de la production prévue d’ici à la fin de l’année 2007.
Enfin, le 12 avril dernier, le gouvernement a accordé un permis d’exploitation d’un gisement d’or à Inata (Nord) pour une durée de neuf ans à Resolute West Africa. L’exploitation de ce gisement sera assurée par la Société des mines de Bahouro, détenue à 90 % par Resolute West Africa, filiale du groupe canadien Goldbelt Resources Ltd. (GLD). La date de démarrage des activités d’extraction n’est pas encore connue, mais celles-ci devraient durer neuf ans, à raison d’une production d’environ 2,4 tonnes d’or par an. Elle procurera au Trésor burkinabè plus de 1,3 milliard de F CFA de revenus indirects.
Le site d’Inata illustre le vif regain d’intérêt que nourrit le métal jaune. Les prospections sur le site d’Inata avaient été lancées en 1994, sur une superficie de 1 600 km2. Environ 4,6 milliards de F CFA ont alors été investis dans les recherches géologiques et minières. Relancées à la faveur de l’envolée des cours mondiaux, ces prospections ont permis de localiser en 2005 un gisement d’environ 9 millions de tonnes de minerai à une teneur moyenne de 2,5 grammes par tonne, soit environ 22,5 tonnes d’or métal.
La relance des activités sur certains sites prometteurs devrait permettre de redonner vie à la filière, mais elle ne fait pas toujours l’unanimité. Ainsi, à la fin d’août 2006, une manifestation a été organisée à Gaoua (à environ 400 km au sud-ouest de Ouagadougou) pour protester contre l’exploitation d’un site aurifère sur une colline sacrée située à proximité de la ville. Cette revendication « officielle » dissimulerait, en réalité, des motifs plus prosaïques : les manifestants s’opposaient en fait au projet du gouvernement d’exploiter officiellement le site, déjà « occupé » par des mineurs artisanaux qui y travaillent en toute clandestinité. Dans la région de Gaoua comme sur le reste du territoire burkinabè, des centaines de sites aurifères sont exploités clandestinement. Une pratique qui représente un manque à gagner important pour l’État et un risque majeur pour ceux qui s’y adonnent. Le 17 août 2006, l’effondrement d’une mine d’or à Poura (à 150 km à l’ouest de Ouagadougou) avait fait officiellement trois morts, six blessés et dix disparus, tous des orpailleurs. Si bien que, début novembre 2006, le Conseil des ministres a créé une Brigade antifraude destinée à contrôler les quantités d’or extraites de façon informelle et à améliorer le recouvrement fiscal de la filière. Le désintérêt pour le métal jaune observé à la fin des années 1990 avait laissé le champ libre aux chercheurs d’or artisanaux et encouragé la prolifération de comptoirs d’achat informels autour des sites abandonnés ou inexploités. Désormais, les artisans sont confrontés à une concurrence accrue, celle des multinationales.

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