Covid : Omicron, nouveau variant d’Afrique australe au cœur des inquiétudes

Alors que l’OMS se réunit en urgence ce vendredi pour évaluer la dangerosité du variant, plusieurs pays, inquiets des mutations inédites de celui-ci, ont déjà fermé leurs frontières aux voyageurs arrivant du sud du continent.

Laboratoire de traitement des tests PCR, en Afrique du Sud. © Waldo Swiegers/Bloomberg via Getty Images

Laboratoire de traitement des tests PCR, en Afrique du Sud. © Waldo Swiegers/Bloomberg via Getty Images

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Publié le 26 novembre 2021 Lecture : 4 minutes.

Jeudi 25 novembre en milieu de journée, l’OMS ne cachait déjà plus son inquiétude. Lors de son briefing hebdomadaire, Matshidiso Moeti, la directrice régionale de l’OMS, expliquait qu’après « presque quatre mois d’une baisse soutenue, le nombre de cas de Covid-19 se stabilisait en Afrique. » En particulier dans la partie australe du continent où, « pour la première fois depuis le pic de la troisième vague en août, le nombre de cas avait augmenté, bondissant de 48 % au cours de la semaine qui s’est achevée le 21 novembre. »

Quelques heures à peine après cette première mise en garde, une équipe de scientifiques sud-africains, emmenée par le virologue Tulio de Oliveira, directeur du Center for Epidemic Response and Innovation, rattaché à l’université du Kwazulu-Natal, enfonçait le clou. L’emballement actuel du nombre de cas en Afrique du Sud, et dans les pays voisins, était sans doute lié à l’identification d’un tout nouveau variant du Covid, nom de code Omicron, identifié pour la toute première fois au Botswana le 11 novembre. Jeudi 25 novembre, les chercheurs recensaient 22 cas confirmés en Afrique du Sud, un au Botswana (le premier patient testé) et un à Hong Kong, ce dernier cas étant un voyageur en provenance d’Afrique du Sud.

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Caractéristiques surprenantes

Ce vendredi 26 au matin, le bilan était passé à 77 cas dans la province sud-africaine de Gauteng (la plus peuplée du pays, où se trouvent les villes de Pretoria et de Johannesburg), 4 au Botswana, toujours un seul à Hong Kong et un en Israël, arrivé par avion du Malawi. Les chiffres restent donc très modestes, même s’ils progressent vite. Pourtant, le variant Omicron fait peur. Prenant la parole aux côtés du virologue Julio de Oliveira, le ministre de la Santé sud-africain Joe Phaahla (nommé à ce poste en remplacement de Zweli Mkhize au début du mois d’août) parlait déjà d’une « menace majeure ».

Les évolutions de cette version du virus touchent la fameuse protéine Spike

La nature du nouveau variant inquiète en effet les chercheurs. Il serait « très différent » de toutes les formes de coronavirus observées ces derniers mois, variant Delta inclus, et présenterait des caractéristiques « surprenantes ». Le principal sujet d’inquiétude concerne les mutations qu’il a subies. Certes, les virus mutent en permanence, mais le nombre d’évolutions observées sur celui-ci est sans précédent, et beaucoup touchent la fameuse protéine Spike, l’élément extérieur de la cellule qui lui permet de se fixer dans l’organisme du patient. Or la plupart des vaccins développés à ce jour ciblent précisément cette protéine, et les mutations font craindre une baisse de leur niveau d’efficacité. Selon le professeur Richard Lessells, qui travaille également sur le sujet, le variant Omicron présenterait aussi « un potentiel de propagation très rapide ».

La menace est jugée suffisamment sérieuse pour que l’OMS ait décidé de se réunir ce vendredi pour discuter de la dangerosité du variant et échanger sur les mesures à prendre afin de freiner sa dissémination. Dans les prochains jours, selon la procédure habituelle de l’agence onusienne, elle décidera de le classer soit parmi les « variants préoccupants » (VOC) soit parmi les « variants d’intérêt » (VOI), ce qui conditionnera le niveau d’alerte et l’ampleur des moyens déployés.

Les scientifiques très partagés

Sans attendre, de nombreux pays ont déjà adopté des mesures de précaution, parfois drastiques. Moins de 24 heures après l’annonce des scientifiques sud-africains, le Royaume-Uni, la France (où les autorités prédisent l’arrivée imminente d’une cinquième vague), l’Italie, l’Allemagne et Singapour ont refermé leurs frontières aux voyageurs arrivant d’Afrique australe. Et ce vendredi matin, les bourses asiatiques plongeaient toutes de 2 à 3 %, bientôt imitées par les places européennes à mesure qu’elles ouvraient leurs cotations. La crainte des financiers : que le variant mutant provoque de nouveaux confinements, synonymes de ralentissement de l’activité économique.

Les mutations du variant Omicron sont peut-être liées à la santé dégradée du patient découvert au Botswana

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À cette heure pourtant, la communauté scientifique reste très partagée sur la dangerosité réelle du variant. Si certains postent déjà sur Twitter des messages parlant d’un virus « horrible » ou du « pire variant jamais observé », d’autres rappellent que certaines mutations observées depuis le début de la pandémie, en particulier le variant Beta, n’ont finalement pas eu l’impact dévastateur annoncé, et que rien ne permet encore de préjuger du potentiel de propagation du nouveau virus, si ce n’est des extrapolations. Certains estiment même que le nombre exceptionnel de mutations constatées est peut-être lié à l’état de santé très dégradé du patient découvert au Botswana.

La principale inquiétude tient, à vrai dire, à une possible diminution de l’efficacité des vaccins face à cette nouvelle forme du coronavirus. Le 24 novembre, Tedros Ghebreyesus, le directeur général de l’OMS, déclarait déjà qu’avec l’émergence du variant Delta, l’efficacité moyenne des vaccins était tombée à 40 % (sans doute beaucoup plus pour les sérums à ARN-messager mais probablement encore moins pour quelques autres…), et qu’il était plus crucial que jamais de continuer à porter le masque et à respecter l’ensemble des mesures barrières instituées depuis le début de la pandémie. L’organisation a aussi précisé le 26 novembre qu’à ce stade, les restrictions de voyages ne se justifiaient pas encore, visiblement sans être entendue.

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Mais pour les responsables Afrique de l’OMS, la cause semble entendue : ils estiment déjà qu’une quatrième vague de contaminations, aggravée par les nombreux déplacements qui auront lieu à l’occasion des fêtes de fin d’année, va déferler sur le continent au début de 2022.

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