Gorée, gardienne de la mémoire

À l’instar de la France, le Sénégal commémore, le 10 mai, l’abolition de l’esclavage. Dans un des hauts lieux de la traite négrière.

Publié le 9 mai 2007 Lecture : 2 minutes.

L’île de Gorée, située au large de Dakar, accueille du 10 au 12 mai la première édition du Festival international du conte et de la parole, organisé dans le cadre de la commémoration de l’abolition de l’esclavage. Conteurs, griots, musiciens, écrivains, artistes en tout genre d’Afrique, d’Amérique et d’Europe sont attendus sur ce site historique.
Durant trois jours, plus de vingt conteurs sénégalais, ivoiriens, congolais, suisses et canadiens sillonneront l’île pour raconter l’esclavage et la traite négrière, mais également pour susciter une réflexion sur la voie à suivre afin de construire un monde d’amour et de paix si cher à Ben Zimet, créateur et directeur artistique du festival.
L’idée de cette manifestation a commencé à germer il y a plusieurs années dans l’esprit de ce chanteur et conteur connu en Europe et en Amérique pour ses spectacles sur la transmission de la culture yiddish. Fils d’un juif polonais et d’une juive allemande, Ben Zimet a été « un enfant traqué » par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Petit, dit-il, il avait déjà dans son inconscient un « rêve africain ». Pour lui, le monde a besoin de la mémoire et d’une prise de conscience pour entamer sa marche vers l’abolition de tous les crimes commis quotidiennement contre les uns et les autres. Le thème du festival est d’ailleurs « Esclavages et traite négrière ». « Esclavages » au pluriel, car « il existe un esclavage contemporain et il y a aussi des enfants qui sont exploités » un peu partout à travers le monde.
« Le conte n’est pas fait pour endormir les enfants, mais pour les réveiller, eux, et les adultes également », explique Ben Zimet. Voilà pourquoi conteurs et griots distilleront la parole à chaque coin de l’île durant tout le festival. Seules ou accompagnées de notes de kora, de balafon, de violon ou de guitare, ?les voix s’élèveront au-dessus du ?ressac pour raviver les consciences des grands et des petits.
Parmi les personnalités qui participeront à la manifestation, Christiane Taubira, députée guyanaise, à l’origine de la loi française votée le 10 mai 2001 reconnaissant la traite négrière et l’esclavage comme crimes contre l’humanité. L’écrivain et peintre sud-africain Breyten Breytenbach, emprisonné pendant près de dix ans sous l’apartheid, est également attendu. Ibrahima Seck, historien sénégalais spécialiste des relations entre les cultures africaines et afro-américaines, ainsi que Joseph Ndiaye, conservateur de la Maison des esclaves de Gorée, seront eux aussi présents.
Le vu de Ben Zimet est d’inscrire le Festival du conte et de la parole dans la durée. La deuxième édition est prévue en 2008, toujours à Gorée, « haut lieu symbolique de la traite négrière contre lequel les thèses révisionnistes contestant le rôle et l’importance de l’île durant l’esclavage ne peuvent rien, car, quel que soit le nombre d’Africains déportés, elle reste un lieu de mémoire », rappelle Ben Zimet.

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