« Nous bénéficions déjà d’une meilleure écoute »

Le président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) attend du gouvernement qu’il accélère les réformes.

Publié le 8 avril 2003 Lecture : 3 minutes.

Hassan Chami préside la confédération patronale marocaine depuis juin 2000. Ce natif de Fès, fin lettré, est diplômé de l’école parisienne des Ponts et Chaussées. Il a été ministre des Travaux publics et de la Communication au début des années soixante-dix, avant de diriger l’Office de commercialisation des exportations. Au début des années quatre-vingt, il fonde des entreprises spécialisées dans l’ingénierie et le forage. Homme d’affaires prospère et respecté, il est aussi à la tête d’un bureau d’études et d’une fabrique de carreaux et de céramique

JEUNE AFRIQUE/L’INTELLIGENT : Le Maroc vient de renouer avec une croissance forte. L’embellie vous paraît-elle durable ?
HASSAN CHAMI : La situation internationale est tendue et pourrait avoir des répercussions difficiles à quantifier. Mais si l’on fait abstraction de cette inconnue, je crois que le Maroc, sur le plan de la croissance, est en train de récolter les fruits de ses efforts de mise à niveau et d’intégration à l’économie internationale. La progression du Produit intérieur brut (PIB) industriel (hors agriculture) est d’environ 4 % par an. Si les réformes que nous souhaitons voir engager sont amorcées, sinon accomplies, dans le cadre de la présente législature, le pays pourra réussir de meilleures performances encore. Les chantiers sont connus : la poursuite de la mise à niveau des entreprises et des administrations, notamment la justice, qu’il faut rendre plus prévisible ; le démantèlement des derniers monopoles étatiques ; la modernisation des rapports sociaux, qu’il faut rendre moins conflictuels.

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JAI : Le rythme des réformes est-il suffisamment soutenu ?
HC :En tant que président du patronat, je suis le premier à déplorer la lenteur du processus de prise de décisions. C’est le revers de la médaille démocratique. Il est bien évident qu’une démocratie naissante comme le Maroc est moins efficiente qu’une démocratie établie, avec des circuits de négociation rodés. Mais l’existence d’un processus démocratique nous donne une meilleure visibilité, et, d’un point de vue économique, cela apporte un plus en termes de compétitivité. Le système économico-politique marocain est plus proche de ceux des pays occidentaux que de ceux des pays de son environnement immédiat. Dans la compétition internationale, c’est un réel atout.

JAI : L’équipe dirigée par Driss Jettou est-elle davantage en phase avec les attentes des entreprises que l’équipe Youssoufi ?
HC :Il y a davantage d’écoute et de réactivité, nous espérons que cela durera pendant les cinq ans de la législature… Beaucoup de nos revendications ont trouvé des réponses satisfaisantes. Nous avons demandé la levée des monopoles paralysant l’économie marocaine, et le Premier ministre vient d’annoncer l’introduction de la concurrence dans le domaine de la gestion portuaire. Beaucoup de ministres sont issus du monde de l’entreprise et recherchent d’abord l’efficacité.

JAI :Le niveau du chômage – 12,7 % de la population active – reste élevé malgré la croissance que vous évoquiez…
HC :Il faut mécaniser et robotiser les processus de production pour amener les entreprises marocaines aux standards internationaux. La mise à niveau est donc momentanément destructrice d’emplois. Mais elle est aussi synonyme de croissance plus soutenue, donc de création d’emplois. Avec un taux de croissance industrielle de 4 %, on arrive à équilibrer les deux phénomènes. Si on passe ce cap, le nombre de chômeurs commencera à diminuer.

JAI :Quels sont les freins qui entravent le décollage de l’économie ?
HC : Il reste à faire évoluer les mentalités, y compris celles des entrepreneurs, et à moderniser les rapports patronat-syndicats. Nous avons inauguré une démarche nouvelle et prometteuse en signant des contrats-programmes entre la CGEM et le gouvernement dans les secteurs du tourisme et du textile. Il faut les étendre à des filières comme la pêche ou la promotion immobilière. Et l’État doit se transformer, s’attacher à orienter et à réguler l’activité économique au lieu d’intervenir directement, ce qui engendre surcoûts et inefficacité. Si tous ces obstacles sont levés, un taux de 6 % ou 7 % de croissance serait réalisable. Mais il faudra aussi continuer à résorber le fossé qu’on a laissé se creuser entre le « Maroc utile », correspondant en gros à la bande littorale – 30 % de la population – et le « Maroc inutile ». Des efforts ont été entrepris dans ce sens depuis quelques années. Rattraper les déficits sociaux sera délicat et coûteux, mais c’est la clé d’un développement harmonieux.

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