Bush, un nouveau Torquemada

Pour certains lecteurs, Bush rappelle l’inquisiteur espagnol du XV e siècle. Un symbole de l’obscurantisme religieux.

Publié le 8 avril 2003 Lecture : 9 minutes.

J’ai des amis américains et j’admire le « rêve américain ». Je ne suis pas religieux, mais intéressé par les questions métaphysiques. Je ne suis pas politologue, ni spécialiste des questions économiques ou militaires… Je suis un simple citoyen qui, aujourd’hui, rompt son silence, sans prétention, seulement atteint par l’urgence de s’exprimer.
Quelles que soient les horreurs perpétrées par le régime de Saddam Hussein, dont personne ne conteste la véracité, la décision de se passer de l’accord de l’ONU et l’unilatéralisme impérial américain sont porteurs de désastres. Nous verrons sans doute une victoire à la Pyrrhus des États-Unis, qui, dans un monde globalisé, sera sans aucun doute la défaite de tous, sans exception.
Je voulais croire que les Torquemada [Juan Torquemada, inquisiteur espagnol célèbre pour son intolérance, 1388-1468] et autres adeptes de pogroms étaient en voie de marginalisation dans le monde occidental. Et voilà que le président George W. Bush et ses plus proches collaborateurs montent les marches de l’obscurantisme religieux. Celui-là même que certains Occidentaux reprochent souvent à certains musulmans, confondant souvent allègrement dans une même condamnation les textes sacrés et ce qu’en ont fait les hommes.
Priez et jeûnez ! Quelle vision affligeante et ignominieuse que celle de voir le dirigeant actuel de la superpuissance mondiale oser en appeler à Dieu pour justifier son action militaire en Irak et commander à ses compatriotes un jour de jeûne et de prière. Que sont devenus l’amour du prochain et la compassion chrétienne dans les mains de Bush junior !
J’appelle de mes voeux un voyage du pape à l’ONU ! J’espère que le pape, si l’intransigeance de l’administration Bush n’offre d’autre possibilité, saura appeler les troupes américaines qui ne sont pas encore engagées sur le théâtre irakien à un devoir de désobéissance au nom de la foi et des valeurs chrétiennes. J’attends que la diplomatie du Vatican, dans le secret ou publiquement, laisse peser la perspective d’une excommunication de M. Bush et de ses principaux va-t-en-guerre, car on ne doit pas pouvoir avec une impudence fétide se réclamer de Dieu quand on apporte la mort.
Manuel de Font-Réaulx
Paris, France

« Pax americana »
J’apprécie la fécondité de la pensée de Mohamed Talbi. Il nous fait découvrir en grandes lignes l’histoire de Bagdad, une ville au passé glorieux. Je suis en désaccord avec lui à propos du « Djihad coranique et Djihad biblique » (J.A.I. n° 2180-2181), mais je le félicite pour avoir réussi « Delenda est Bagdado ! » (n° 2200). Le parallélisme entre les villes, les personnes et les événements est frappant, émouvant et étonnamment vrai : Carthage et Bagdad, Rome et Washington, les deux Scipion et les deux Bush, Caton et Blix, Banno et Powell, Pax romana et Pax americana, le djihad qui porta Rome au triomphe sur Carthage, et l’actuel, celui de Washington, dont Bush et ses amis sont convaincus qu’il les conduira à la victoire. Toutefois, j’ai peur que Talbi ne pousse sa comparaison jusqu’à assimiler Bush au christianisme et Saddam à l’islam. Bush n’est pas un exemple pour les chrétiens, comme Saddam ne l’est pas non plus pour les musulmans. Tous les deux ne représentent que leurs propres ambitions et idéologies.
REMIGIUS YAO, Convento dell’Annunciata,
Monte Orfano, Italie

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J’ai mal à mon Irak
Comme des milliards de « braves gens » tout autour de la planète, j’ai mal à mon Irak. Ma souffrance est insoutenable. Il y a urgence à la paix. Je crois à la puissance de la parole et de la musique. Je vous envoie ces mots tout simples, mais forts contre « les puissants ». Dans mon coeur, il n’y a pas de haine :
Arrêtez le massacre
Les chars au placard
Au violon, les canons
Au lit les fusils
Le courage, pas la rage
La dégaine, pas la haine
L’amour, pas la guerre
Ennemi, mon ami.
José Corbo, Saly, Sénégal

Moi, Sicilienne…
Je m’appelle Anna Maria Mazza, sicilienne née à Noto mais vivant à Ragusa. Je suis fière d’être votre abonnée et j’apprécie grandement la qualité et la clarté de vos articles dans l’intelligent. Pour ce qui est de la guerre en Irak, je n’approuve pas la violence de Bush dans son affrontement avec Saddam. Bush veut diriger et soumettre tous les pays arabes. Le vrai terrorisme est en Europe et en Amérique. Les pays arabes sont riches de valeurs et de traditions que les hommes de l’Occident chrétien ont perdues. Moi, Sicilienne, je me sens aux côtés de Saddam.
Anna Maria Mazza, Ragusa, Italie

Pas une larme pour Saddam
Depuis que les Américains multiplient les manoeuvres pour justifier leur décision de marcher sur Bagdad, les actes de solidarité instinctive en faveur de l’Irak font florès.
À chacun sa nuit de deuil. Je le dis sans aucun frisson de conscience. Je suis contre l’hypocrisie. Je n’ai jamais fait la guerre. Mes mains ne portent aucune tache de sang non plus. Ce qui est loin d’être le cas de Saddam. Que Saddam ait bâillonné son peuple n’échappe à personne. Du sang kurde et d’autres nationalités a été versé à cause de lui. En s’attaquant au Koweït, il s’était attaqué à plus fort que lui : les intérêts américains. Dieu seul punit.
Bios Diallo, poète mauritanien
Paris, France

Le choc des cultures
À l’heure de la guerre injuste menée contre l’Irak, qui est une agression et une invasion, ceux qui ont prôné la thèse du « choc des cultures », en Occident comme en Orient, doivent se réjouir que la triste réalité de ces nouveaux massacres leur donne apparemment raison. Pourtant, il n’y a pas d’alternative crédible au dialogue.
L’objectif de la théorie du « choc » est de tenter de légitimer l’ambition de la première puissance, de gouverner le monde par une hégémonie sans partage, en commençant à imposer la loi du plus fort contre l’épouvantail d’un nouvel ennemi fabriqué de toute pièce.
Ceux qui refusent le dialogue condamnent le monde musulman et occultent les faits injustes, tragiques et monstrueux de l’histoire contemporaine, comme le génocide du peuple palestinien. Certes, de nouvelles monstruosités ont pris forme aujourd’hui, de tous les cotés, au Nord comme au Sud. Nul n’a le monopole de la violence et de la barbarie.
Ce que nous refusons, c’est le fait de travestir la vérité historique et culturelle du monde musulman. Nous refusons la logique de guerre dans laquelle veulent nous enfermer les extrémistes de tous bords. Voilà pourquoi le discours qui privilégie la logique insensée du « choc » qui exclut et ferme le jeu ne peut être porteur d’avenir.
Mustapha Chérif, ancien ministre algérien, professeur de philosophie politique à l’université d’Alger

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Un sauveur est né
Depuis que les États-Unis se sont découvert une vocation messianique, particulièrement depuis ce 11 septembre 2001 quand le chevaleresque peuple américain est devenu allergique au terrorisme, l’humanité tout entière a (re)trouvé le sommeil : désormais, Oncle Sam veille au grain afin que sur cette terre les hommes échappent à tout jamais à la misère, à l’injustice et à la dictature. L’opération « Liberté en l’Irak » suffit à rappeler aux sceptiques naïfs que le glas a sonné pour les dictatures surannées, surtout celles qui se nourrissent de pétrole. Mais, enfin, qui nous sauvera de ce sauveur
André Marie Eboni, enseignant
de philosophie, Garoua, Cameroun

Du tac au tac
La Côte d’Ivoire se vantait d’être le bon élève des bailleurs de fonds, symbole de la réussite et de la démocratie, du développement socio-économique, que dire encore, de l’ouverture sur le monde extérieur ! Elle allait même jusqu’à qualifier certains pays africains en guerre, notamment le Tchad, de pays sauvage. Mais que voit-on aujourd’hui en Côte d’Ivoire ? Peut-être des scènes de théâtre ? Loin de moi l’idée de me réjouir du malheur des Ivoiriens, mais je ne fais que leur rendre la monnaie de leur pièce. Comme le disait un grand chanteur africain, l’Ivoirien Alpha Blondy : « Celui qui n’a pas traversé l’autre rive ne doit pas se moquer de celui qui est en train de se noyer.
Mahamadène Ali Nassour
N’Djamena, Tchad

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Burundi : les racines du mal
Tout le monde veut résoudre superficiellement le conflit burundais, mais on passe à côté des racines du problème. L’évangélisation et la colonisation : les premiers missionnaires croyaient que les Burundais ne connaissaient rien de Dieu. Les colonisateurs belges ont injecté le virus de la division entre Hutus et Tutsis. Au moment de l’indépendance, ils ont dit aux rares Hutus scolarisés qu’il fallait se rebeller contre les Tutsis qui les avaient toujours tenus en esclavage. Et ce virus continue à sévir aujourd’hui. Les quelques Hutus et Tutsis qui se sont opposés à cette idéologie ont été tués. Plus récemment, on sait le sort qui a été réservé à Son Excellence l’archevêque de Gitega, Mgr Joachim Ruhuna. Parce qu’il prenait des distances par rapport au reste du clergé catholique burundais, aveuglé par la politique en cours au Burundi, il a lui-même été lâchement assassiné.
La classe politique burundaise n’a jamais pris l’initiative d’éduquer le peuple à l’amour et à l’unité. L’armée est majoritairement tutsie. Les rebelles sont majoritairement hutus. Est-ce que les militaires tutsis ne tuent pas leurs frères tutsis ? Est-ce que les rebelles hutus ne tuent pas leurs frères hutus ? Ni les rebelles, ni l’armée régulière, personne n’a l’intention de lutter vraiment pour le bien du peuple. Quant à la communauté internationale, elle est impuissante face aux puissances qui attisent la haine.
Déo Negamiyimana
France

Appellation abusive
Je suis l’un des fidèles lecteurs de votre hebdomadaire en Allemagne. Sans J.A.I., je serais sous-informé, la presse allemande ne s’intéresse pas vraiment à la situation politique et économique de l’Afrique. Il est de mon devoir de citoyen d’exprimer mon opinion envers la classe politique congolaise corrompue et sans scrupule. Le pays n’est pas encore une démocratie malgré l’appellation abusive de « République démocratique » : il ne possède aucune Constitution reconnue garantissant les droits fondamentaux. La manifestation pacifique du 5 mars a été ainsi durement réprimée par la police. Le régime de Kabila II ne cherche qu’à conserver son pouvoir en intimidant le peuple congolais.
Yowa Mwanalongo
Recklinghausen, Allemagne

La Côte d’Ivoire s’en sortira
La Côte d’Ivoire, c’est l’Allemagne de l’Afrique de l’Ouest, c’est le coeur de l’économie ouest-africaine. Quand ça ne va pas en Côte d’Ivoire, ça ne va pas dans toute l’Afrique de l’Ouest. Moi, je ne suis pas ivoirien, je suis un Guinéen qui vivait en Côte d’Ivoire depuis mon enfance. La Côte d’Ivoire est tombée dans une crise politico-ethnique. Elle s’en sortira. L’orage passera. Tous les pays développés sont passés par de telles épreuves. Le développement économique demeure une réalité.
Amara Sidibé
Barcelone, Espagne

Non au costume occidental !
Je tombe sur la photo d’un groupe de chefs d’État africains réunis le 3 février en Éthiopie pour parler de problèmes africains (J.A.I. n° 2196). Je constate que tous sont habillés à l’occidentale, à l’exception de Mouammar Kadhafi (Libye) et d’Olusegun Obasanjo (Nigeria). Kadhafi se drape dans du kente, la fierté du textile ghanéen en passe de devenir la référence africaine du tissu. N’est-ce pas surprenant que ce soit Kadhafi et non le Ghanéen John Kufuor qui fasse la promotion du kente ? Obasanjo ne se départ jamais de son agbada national.
Fort de ces deux exemples, je suggère l’introduction d’une clause dans la charte de l’Union africaine stipulant que nul président, Premier ministre ou ministre ne siège aux assises de l’organisation panafricaine en costume autre que national.
Le coût total des costumes occidentaux que portent les présidents et ministres africains représente une somme importante et donc un manque à gagner pour l’économie africaine, les tisserands, les tailleurs, les couturiers… N’est-ce pas remarquable que ce soit Kadhafi, et non Thabo Mbeki, président en exercice de l’Union africaine, qui rappelle aux Africains que le textile africain est beau et qu’il rend majestueux celui qui le porte ?
Nouk Bassomb
New York, États-Unis

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