High-tech : Pékin met le paquet
Cela fait vingt ans que la Chine clame sa volonté de combler le retard technologique qui la sépare de l’Occident. De fait, de 1992 à 2002, dernière période pour laquelle des statistiques sont disponibles, Pékin a plus que doublé la part du PIB qu’il consacre à la recherche et au développement (RD). Aux États-Unis, dans le même temps, cette proportion stagnait. Le nombre de diplômés chinois du 3e cycle a augmenté de 14 % chez les scientifiques et les ingénieurs ; leurs homologues, en Amérique, sont de moins en moins nombreux. Les exportations chinoises à forte composante technologique ont progressé de 22 % par an ; celles de l’Oncle Sam ont reculé. Dans les universités américaines, les Chinois représentent 25 % des diplômés du 3e cycle en sciences et technologies, et Pékin fait tout pour les faire revenir au bercail.
En implantant de gigantesques pôles de recherche en Chine, les entreprises occidentales accélèrent ces progrès. General Electric compte vingt-sept laboratoires qui travaillent sur des projets allant de la conception des matériaux composites au modelage moléculaire. Microsoft, avec deux cents chercheurs, Cisco, DaimlerChrysler, IBM, Intel et beaucoup d’autres suivent le mouvement.
Quelles conséquences attendre de cette mondialisation de la RD ? Les experts sont divisés. Dans un rapport à paraître, Nicholas Lardy, de l’Institute for International Economics, relativise le poids de la Chine en soulignant la faible sophistication de ses exportations high-tech, sa forte dépendance vis-à-vis des technologies importées et les avantages que les entreprises qui investissent là-bas en retirent. Pour les alarmistes, au contraire, comme Ernest Preeg, de la Manufacturers Alliance/MAPI, et Kathleen Walsh, du Henry L. Stimson Center, ce « grand bond en avant » technologique menace à la fois l’économie et la sécurité des États-Unis.
Fort logiquement, les sociétés américaines sont à l’affût des meilleurs talents et des plus bas coûts, où qu’ils soient. Ce faisant, elles forment des scientifiques et des ingénieurs étrangers et leur donnent accès – ainsi qu’à l’omniprésent État chinois – à leurs programmes de recherche.
S’ils veulent conserver leur incontestable avance, les États-Unis doivent cesser de disperser leur recherche fondamentale. Et se rendre compte que les objectifs de leurs multinationales ne coïncident plus forcément avec les intérêts de la nation. Quelle légitimité y a-t-il, par exemple, à subventionner une entreprise comme Intel si ce sont ses partenaires chinois qui bénéficient de son savoir-faire ?
Dans les années 1960, les États-Unis avaient été galvanisés par les Spoutniks. Dans les années 1980, ils ont été éperonnés par le « made in Japan ». Aujourd’hui, l’Amérique a besoin d’une nouvelle dose d’adrénaline. La menace chinoise pourrait en faire office. À condition que cette dose ne soit ni trop faible ni trop tardive.
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