L’affaire IB

Que s’est-il passé entre le sergent-chef, cerveau de la tentative de putsch de 2002 contre le président Gbagbo, et ses anciens amis de la rébellion qui contrôle le nord du pays ?

Publié le 7 janvier 2008 Lecture : 2 minutes.

« Au vu des différentes informations que nous avons reçues et recoupées, nous avons pris la décision de mettre fin au séjour dans notre pays du sergent-chef Ibrahim Coulibaly [alias IB, NDLR] qui utilise le Bénin comme base arrière pour mener des actions subversives en Côte d’Ivoire. » La sentence est sortie, le 29 décembre, de la bouche du ministre béninois de l’Intérieur, Félix Hessou. Fruit d’intenses tractations secrètes, elle est intervenue vingt-quatre heures après que le Premier ministre et leader des Forces nouvelles (FN, ex-rébellion), Guillaume Soro, a dénoncé un « complot » ourdi par certains membres infiltrés dans son mouvement pour « s’emparer de Bouaké ». Non sans indiquer dans un communiqué que le sergent-chef s’était rapproché de la frontière ivoiro-ghanéenne, d’où il devait rallier Abidjan, « afin de perpétrer, dans la nuit du jeudi 27 au vendredi 28 décembre 2007, un coup d’État ».
L’alerte a été donnée par le renseignement militaire des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci), qui, le 20 décembre, a averti le chef de l’État, Laurent Gbagbo, du mouvement suspect de plusieurs dizaines d’hommes entre Mbahiakoro et Ouellé, dans le centre-est du pays, à environ 250 km d’Abidjan. Coïncidence ? Paranoïa ? Le 26 décembre, date à laquelle était censée se dérouler l’opération, un Malien du nom de Mamadou Sylla, qui passe pour être le marabout d’IB, était sur le point de débarquer à Abidjan d’un avion en provenance de Bamako. Sur instruction de Philippe Mangou, chef d’état-major des Fanci, il est remis dans l’appareil qui devait rejoindre Cotonou. Ce même jour, Gbagbo et Soro se réunissent pour « croiser leurs informations » et décider de contrer le sergent-chef.
Garant de l’accord de paix de Ouagadougou du 4 mars 2007, Blaise Compaoré est le premier chef d’État à être contacté par Gbagbo. Le président burkinabè multipliera les coups de fil à son homologue béninois, Yayi Boni, et obtiendra qu’IB soit déclaré persona non grata au Bénin.
Après quoi les deux têtes de l’exécutif ivoirien conviennent que le chef de l’État doit signer, le 31 décembre, une demande d’extradition assortie d’un mandat d’arrêt international. Ce qui – bien que cela n’ait pas encore été fait au moment où nous mettons sous presse – devrait permettre de poursuivre le putschiste présumé partout où il pourrait se trouver.
IB, que l’on dit être tantôt à Bruxelles où vit sa famille, tantôt au Ghana, tantôt au Nigeria, n’a pourtant pas toujours été un homme à abattre. Rapproché de Gbagbo en 2004 par Mathieu Kérékou, alors président du Bénin, il a, par le passé, bénéficié plusieurs fois des largesses du palais de Cocody contre la promesse de déstabiliser Soro à la tête des FN. De bonne source, la somme de 100 millions de F CFA (152 000 euros) nécessaires à la formation du parti politique du sergent-chef aujourd’hui honni lui a été portée à l’époque en main propre par un commissaire, missi dominici de la présidence pour les missions délicates.

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