Transition en douceur pour l’instant

On prédisait à l’Autorité palestinienne les pires difficultés pour gérer l’après-Arafat. Il n’en a rien été. Mais la candidature de Marwane Barghouti à la présidentielle du 9 janvier laisse craindre des remous au sein du Fatah.

Publié le 6 décembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Il aura fallu attendre dix ans, depuis le lancement du processus de Barcelone, en novembre 1995, pour qu’une réunion euro-méditerranéenne regroupant les chefs de la diplomatie de l’Union européenne (UE) et leurs homologues méditerranéens s’achève sur une note d’optimisme s’agissant du Proche-Orient. Les participants à la rencontre du 29 novembre, à La Haye, ont en effet délivré un satisfecit à l’Autorité palestinienne pour sa gestion d’un après-Arafat que l’on prédisait chaotique. Et apprécié la tonalité apaisante des déclarations de Silvan Shalom, ministre israélien des Affaires étrangères, à l’issue de ses discussions avec Nabil Chaath, son homologue palestinien.
Le lendemain, 30 novembre, c’est un Kofi Annan en pleine tourmente qui se dit « très heureux quant à la façon dont le peuple palestinien a géré la transition ». Le secrétaire général des Nations unies a sans doute estimé que le mérite n’en revenait pas seulement à la direction palestinienne, mais aussi à l’ensemble de la population.
Certes, les motifs de satisfaction sont nombreux. Les institutions ont fonctionné, les partis, mouvements, organisations de la société civile ont tenu assises et débats. La mort du Père n’a pas entraîné d’hystérie collective, et le deuil est vécu dignement. À Gaza ou en Cisjordanie, l’empoisonnement présumé de Yasser Arafat occupe beaucoup moins les esprits, tournés déjà vers la prochaine étape : le choix de l’homme par qui viendra la naissance de l’État de Palestine avec Al-Qods (Jérusalem) pour capitale. Le scrutin présidentiel du 9 janvier prochain ne sera pas de tout repos : un pays sous occupation, des centaines de milliers de déplacés, une situation socio-économique catastrophique et une administration dépourvue, Israël et Intifada aidant, d’infrastructures, le tout sur fond de rivalités personnelles, de règlements de comptes et de heurts entre des projets de société appelés à s’affronter sur le champ de bataille politique. Bien plus qu’une banale élection présidentielle, ce scrutin aura valeur de référendum d’autodétermination.
Le paysage politique de ce qui n’est pas encore la Palestine tourne autour de trois courants : les nationalistes – de droite et de gauche – regroupés au sein de l’OLP ; les islamistes du Hamas et du Djihad islamique ; et les démocrates incarnés par quelques personnalités des Territoires et une partie de l’intelligentsia palestinienne.
Le Fatah, l’organisation créée par Yasser Arafat, croyait avoir réglé le problème en investissant Mahmoud Abbas, 69 ans, ancien Premier ministre et compagnon de lutte et de négociations de feu Arafat. C’était sans compter un trublion nommé Marwane Barghouti. Après avoir apporté son soutien au candidat du Fatah, le charismatique chef du Fatah en Cisjordanie, qui purge une peine de réclusion à perpétuité dans une prison israélienne, a maintenu, le 30 novembre, sa candidature à l’élection (voir pp. 20-21).
Les démocrates se présentent en rangs dispersés. Sept postulants s’en réclament (voir encadré). Le plus connu d’entre eux est le docteur Mustapha Barghouti (homonyme de Marwane), un militant des droits de l’homme qui préconise la résistance pacifique. Son cheval de bataille ? Une refonte totale du système palestinien en attendant l’établissement de l’État. Sa campagne électorale aura vraisemblablement pour thème principal la lutte contre la corruption.
Les islamistes du Hamas ont annoncé, le 1er décembre, leur décision de boycotter l’élection. Leur argument ? « On ne peut considérer la Loi fondamentale, née des accords d’Oslo, morts et enterrés, de servir de référence dans l’organisation et le fonctionnement de nos institutions, affirme Ismaïl Henayeh, représentant de Hamas. L’ossature politique de ce qu’on désigne par Autorité palestinienne est quasi exclusive au Fatah. Nous récusons le scrutin présidentiel, et nous exigeons des élections générales. » En somme, les islamistes exigent plus que des législatives. Ils veulent une Assemblée constituante qui déterminera l’avenir de la Palestine.

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