Questions autour d’une crise

Vous êtes très nombreux encore à réagir aux événements de début novembre et à imaginer des scénarios pour l’avenir.

Publié le 7 décembre 2004 Lecture : 4 minutes.

La France doit partir
Qu’on le veuille ou non, la France partira de Côte d’Ivoire en marchant sur nos cadavres s’il le faut. Neuf soldats français valent-ils davantage que tous ces jeunes abattus de sang-froid par l’armée française ? Nous prouverons à la face du monde que cette terre
appartient à nos ancêtres. Cela prendra peut-être du temps, mais l’armée gauloise partira comme les Américains ont quitté le Vietnam.

Cessons de nous entre-tuer
Aujourd’hui, notre pays est en guerre, et nous sommes traités de xénophobes. Nous récoltons ce que nous avons semé. Ne cherchons pas les responsables et les solutions ailleurs. Que ce soit du côté du gouvernement ou du côté de l’opposition, nul ne veut faire de concession, ni même écouter pour mieux dialoguer. Personne ne pense au peuple. Au contraire, il est utilisé de part et d’autre. Le voisin d’hier est aujourd’hui l’ennemi. Cessons de nous entre-tuer et de chercher à savoir qui a tort ou raison. Combattons plutôt la corruption, la misère, l’analphabétisme, la prostitution, l’intolérance. La solution de la crise ivoirienne passe par le respect, la tolérance et le dialogue entre tous les fils et les filles de Côte d’Ivoire.

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Nouveau Rwanda ?
Ce qui se passe en Côte d’Ivoire ressemble étrangement à ce qui a eu lieu au Rwanda en 1994. Il y a une ancienne puissance coloniale, la France, qui dirige une force d’interposition comme ce fut le cas naguère avec la force belge dans la Minuar. Des accords ont été signés, mais rien n’est mis en application, comme au Rwanda. Comme avec les Belges, les Français sont accusés par les protagonistes, à tort ou à raison, d’être de connivence avec les ennemis des uns et des autres. Une portion de la population est accusée d’être étrangère. D’autre part, l’organisation des « Jeunes patriotes » rappelle dangereusement les jeunes des Interahamwes. Enfin, tout cela se passe au vu et au su de la communauté internationale sans que rien ne soit fait pour neutraliser les forces maléfiques.

Un cauchemar
Je lis avec grand intérêt ce que J.A.I. écrit sur la Côte d’Ivoire. J’apprécie la qualité et l’abondance des informations que vous nous donnez sur cette affaire qui est un cauchemar pour nous autres, non-Ivoiriens. J’ai eu la chance de visiter ce pays et je suis
triste de constater que rien n’est fait pour y ramener l’ordre. Je vous encourage à continuer votre travail d’investigation et à nous informer, nous autres qui ne sommes pas sur place et qui pensons à tous ceux qui souffrent dans ce pays.

À nous de réagir
Pourquoi la communauté internationale et l’ONU ne réagissent-elles pas contre la France, dont la politique est inchangée depuis la décolonisation ? Les chefs d’État africains ne sont que des marionnettes. Tout est contrôlé par l’Élysée et c’est pour cela que je tire mon chapeau à Laurent Gbagbo. Les frontières européennes deviennent de plus en plus difficiles à franchir ; les Européens deviennent de plus en plus nationalistes, pourquoi
pas nous ? Je ne parle pas d’émeutes antifrançaises, mais qu’ils nous respectent comme nous les respectons. Nous devons déplacer le pouvoir des Français et le remettre entre les mains des peuples africains. Je suis père de famille et je préfère apprendre à mes
enfants à se débrouiller seuls.

Éviter le scénario somalien
Durant des décennies, la France a servi de levain aux dictatures les plus ignobles en Afrique. L’apparition de situations explosives, comme c’est actuellement le cas en Côte d’Ivoire, était inévitable. Contrairement à ce que l’on aimerait faire croire, la crise en Côte d’Ivoire n’est nullement une « chasse aux Blancs », mais le début d’un processus d’émancipation vis-à-vis de l’ancienne colonie. Sans le retrait des forces françaises et leur remplacement par des forces neutres, acceptées par la population, une « somalisation » de la crise est à craindre.

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Paris a bon dos
Le drame vécu par les familles des victimes ivoiriennes est égal à celui des familles des neuf soldats français qui ne s’attendaient pas du tout à être canardés par l’armée ivoirienne. La douleur n’a pas de camp ni de couleur et encore moins de nationalité. Dans
mon village, il est conseillé de « ne pas regarder où tu tombes mais l’endroit où tu as trébuché ». La France a sa part de responsabilité. Mais ce n’est pas elle qui a fabriqué le concept d’ « ivoirité » source de tous les maux actuels.

Pour un changement radical
Le président Gbagbo a été élu par miracle grâce à des manipulations. Il n’est pas prêt à perdre le pouvoir, ni lui ni son clan. La présence des Français (tant l’armée que les opérateurs économiques) est souhaitée par la majorité apeurée et silencieuse des Ivoiriens
soucieuse de sécurité. La France doit cependant reconnaître ses erreurs et prendre l’initiative du changement dans ses relations avec la Côte d’Ivoire. La partition menace sérieusement le pays. Beaucoup d’imagination est requise de la part des médiateurs dans ce
conflit. Les accords de Marcoussis et d’Accra ont montré leurs limites. La rédaction d’une nouvelle Constitution, à fondement fédéraliste, serait la bienvenue.

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