William Styron

L’écrivain américain s’est éteint, le 1er novembre, à l’âge de 81 ans.

Publié le 7 novembre 2006 Lecture : 2 minutes.

« Il était tragique et drôle, fort, fier et terriblement doué pour l’écriture. Je suis bouleversé d’apprendre sa disparition. » Belle épitaphe, signée par son compatriote et ami de longue date, l’écrivain américain Kurt Vonnegut, pour saluer le romancier William Styron, 81 ans, décédé d’une pneumonie le 1er novembre à l’hôpital de l’île de Martha’s Vineyard (Massachusetts). La vie n’a pas été tendre pour Styron, né en 1925 à Newport News, en Virginie. À 13 ans, il perd sa mère, emportée par un cancer après une longue agonie qui finit par contraindre l’adolescent à habiter chez des voisins. « La plupart de mes problèmes, je pense, sont venus de mon angoisse permanente à propos de la mort de ma mère. Si j’avais pu être tué au combat, j’aurais vécu cela comme une sorte d’achèvement », avouera-t-il en 1990 dans une interview. Mais la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle il a servi dans une unité de marines stationnée à Okinawa (Japon), l’avait épargné.
Son premier roman, publié en 1951, révèle en filigrane le mal de vivre de l’auteur. Un lit de ténèbres raconte le suicide d’une jeune fille, sur fond d’alcoolisme et de maladie mentale. Ce sont Les Confessions de Nat Turner qui le propulsent vers la célébrité. Situé dans le comté de Southampton, non loin de sa ville natale, ce récit sombre et violent raconte l’histoire de la révolte d’un esclave écrasée dans le sang en 1831, trente ans avant l’éclatement de la guerre de Sécession. Il déclenche immédiatement un tollé de la part des critiques et d’une partie de l’opinion publique, qui accusent l’écrivain de racisme et de déformation de faits historiques, colère que ne calme pas l’attribution du prix Pulitzer en 1967. Styron se défend au nom du droit des artistes à « méditer » sur l’Histoire, mais vivra très mal toute la polémique.
Le Choix de Sophie, publié en 1979, est un roman baroque et érotique, voire métaphysique qui subjugue la critique. Styron y donne toute la mesure de son immense talent et on le compare désormais à son compatriote sudiste William Faulkner, Prix Nobel de littérature 1949, au Russe Vladimir Nabokov ou au Britannique Malcolm Lowry, trois écrivains tourmentés et géniaux. Son héroïne, Sophie, est polonaise et catholique. Rescapée des camps de concentration nazis, où elle a été déportée par erreur, elle vit à New York un amour suicidaire et sadomasochiste avec un jeune Sudiste, sans doute Styron lui-même. Dans le film éponyme, l’actrice Meryl Streep obtiendra l’Oscar du meilleur rôle féminin pour son interprétation juste et émouvante de Sophie.
Mais la polémique enfle encore autour du traitement personnel d’un sujet historique difficile. Au milieu des années 1980, William Styron sombre dans une sévère dépression qui le conduit au bord du suicide. Il en parlera dans Face aux ténèbres, une chronique brève et limpide de sa descente aux enfers. « La mort était comme une présence quotidienne, qui soufflait sur moi ses bourrasques glacées », écrit-il dans son livre. Elle a fini par le serrer pour toujours dans ses bras.

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