Afrique-Israël : place au business !

Fer de lance de la coopération israélienne sur le continent, le secteur privé attend toujours un soutien significatif de la part de son gouvernement. Les opportunités ne manquent pourtant pas entre deux partenaires qui souhaitent renforcer leur collaboration.

Le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz (à droite) et Abdellatif Loudiyi, ministre chargé de l’Administration de la Défense du Maroc, à Rabat, le 24 novembre 2021. © Ariel HERMONI/AFP

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Publié le 27 janvier 2022 Lecture : 4 minutes.

Le président rwandais Paul Kagame, à droite, s’entretient avec le chef du gouvernement israélien, Benyamin Netanyahu, à Kigali, le 6 juillet 2016 © CYRIL NDEGEYA/AFP
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Après avoir normalisé ses relations avec de nombreux pays, Israël continue de développer sa coopération sécuritaire et économique. Et espère intégrer l’Union africaine au titre d’observateur.

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Pour Israël, l’économie n’est jamais très éloigné de la diplomatie. Il en est même parfois l’une de ses principales composantes. Après tout, si l’État hébreu s’est intéressé à l’Afrique ces dernières années, c’est aussi pour contrer l’influence de l’Iran dans les domaines de l’agriculture, de la santé et de l’éducation. C’est également pour suivre le mouvement enclenché par le secteur privé israélien qui a de nouveau investi le continent dès les années 1990 – quand le gouvernement d’Israël comptait alors ses amis africains sur les doigts d’une seule main.

« Nos entreprises ont toujours su faire preuve d’initiatives, prendre des risques. En Afrique comme ailleurs, ce sont les acteurs économiques qui font avancer la diplomatie », confirme Corinne Ganor. Directrice des financements export chez Discount Bank, troisième enseigne bancaire la plus importante du pays, elle est aux premières loges pour constater et donc confirmer « l’intérêt en forte hausse que portent les compagnies israéliennes pour un marché africain elles ont beaucoup à apporter ».

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Cybersécurité, e-santé, agrotech…

Concentrés dans un premier temps sur les secteurs de la sécurité et de la défense, les investisseurs israéliens ont ensuite porté leur intérêt vers le secteur minier, surtout diamantaire, l’énergie, l’agriculture ou la santé. Ils ont été rejoints, ces dernières années, par une nouvelle génération d’entreprises issues de la start-up nation israélienne qui, s’appuyant sur leur haut savoir technologique et numérique, propose les services les plus innovants en matière de cybersécurité, de e-santé, d’agrotech, de télécommunications ou encore d’énergies renouvelables.

Sur les 55 missions économiques, seules quatre sont situées sur le sol africain

Un « cyberpartenariat, selon la formule de l’universitaire Emmanuel Navon, qui apporte une véritable valeur ajoutée à l’Afrique ». Même si cette dernière ne le sait pas encore forcément. C’était d’ailleurs tout l’enjeu du sommet Israël-Afrique, qui devait être organisé en octobre 2017 à Lomé, avant d’être purement et simplement supprimé à la dernière minute face à la réticence de certains poids lourds du continent (Nigeria, Afrique du Sud…). Plus de 150 entreprises israéliennes, présentes dans les domaines de l’agronomie, de l’ingénierie ou encore de la sécurité, avaient prévu de faire le déplacement jusqu’au Togo, pour participer à cet événement sans précédent sur le continent. Le Premier ministre, Benyamin Netanyahou, qui était à l’initiative de ce sommet, enregistra alors l’échec le plus marquant de sa politique africaine.

Malgré l’approche volontariste de l’ancien chef du gouvernement, « le continent reste secondaire s’agissant des moyens mis à disposition par l’État pour aider les firmes israéliennes à s’y implanter », constate un entrepreneur israélien. Sur les 55 missions économiques dont disposent le ministère de l’Économie et de l’Industrie, seules quatre sont situées sur le sol africain, en Égypte, en Afrique du Sud, au Ghana et au Kenya, les deux dernières n’étant opérationnelles que depuis 2018.

Coopération médicale

L’Israël Foreign Trade Risks Insurance Corporation, créé en 1957 pour garantir les investissements du secteur privé israélien à l’étranger, voit le total de ses engagements augmenter d’année en année – il a doublé en 2018 pour atteindre près de 2 milliards de dollars –, mais ne couvre que des projets aux montants modestes. Enfin l’Israël Export Institute (IEI), fondé, lui, en 1958, pour faciliter les contacts entre les entrepreneurs et les structures publiques israéliennes ou étrangères, ne mentionne même pas l’Afrique dans ses statistiques économiques.

Les échanges entre Tel-Aviv et ses partenaires africains ne représentent que 1,5 % du commerce extérieur israélien

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Il faut dire que le continent pèse peu dans les grands agrégats israéliens. D’après l’IEI, le total des échanges réalisés chaque année entre Tel-Aviv et ses partenaires africains ne représente que 1,5 % du commerce extérieur israélien, soit environ 1,3 milliard de dollars. Pour compenser en partie le soutien limité de l’État, les entrepreneurs peuvent aussi s’appuyer sur les réseaux de la Chambre de commerce Israël-Afrique, ainsi que sur ceux du syndicat patronal, la Manufacturers Association of Israel qui tente d’organiser régulièrement des rencontres entre ses membres et leurs homologues africains.

Ils peuvent également compter sur les organisations propres à chaque pays, comme au Maroc, où le secteur privé multiplie les initiatives de rapprochement depuis la normalisation des relations avec Israël, à la fin de 2020. Ainsi la Chambre de commerce et d’industrie Maroc-Israël va organiser son premier forum d’investissement en mai 2022, à Marrakech. Plus de 300 hommes d’affaires issus des deux pays sont déjà inscrits. L’actuelle pandémie devrait aussi donner l’opportunité aux entreprises israéliennes de renforcer leur coopération médicale en Afrique, « de la fourniture de vaccins à la gestion de la vaccination », imagine déjà Emmanuel Navon. Le chercheur voit même plus généralement une concordance des temps entre « une Afrique qui souhaite diversifier ses partenariats et Israël qui veut renforcer les siens ».

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