« Comment répondre aux besoins du secteur privé »

Un an après le Sommet de Tunis sur la société de l’information, Montasser Ouaili, ministre des Technologies de la communication, fait le point sur le développement des infrastructures et des services.

Publié le 7 novembre 2006 Lecture : 5 minutes.

A 46 ans, Montasser Ouaili compte encore parmi les membres les plus jeunes du gouvernement tunisien. Il y est entré il y a dix ans lorsque le président Ben Ali l’a rappelé du Canada où il dirigeait la mission universitaire tunisienne pour le nommer d’abord secrétaire d’État chargé de l’Informatique, puis de l’Enseignement supérieur. Il est finalement devenu ministre des Technologies de la communication en 2004. Ingénieur en génie électrique et titulaire d’un PhD en télécommunications de l’Université de Californie à Los Angeles (Ucla), il a été chercheur à la compagnie Bell Communication Research, professeur à l’université de Tunis, et directeur de recherches à l’Institut régional des sciences informatiques et des télécommunications. Depuis sa prise de fonctions, Ouaili a notamment conduit la privatisation de Tunisie Télécom et présidé la Commission nationale pour le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI), dont la phase finale s’est tenue à Tunis en novembre 2005. n
JEUNE AFRIQUE : Quelles ont été les retombées du SMSI pour la Tunisie ?
Montasser Ouaili : Ce Sommet a d’abord contribué à faire connaître le pays et ses réalisations dans le domaine des nouvelles technologies de l’information, mais aussi dans le domaine touristique. Il a permis de montrer que la Tunisie était capable d’organiser des manifestations internationales de très grande importance et de présenter la Tunisie comme une « destination technologique ». En effet, non seulement nous enregistrons des manifestations d’intérêt, mais nous assistons aussi à la concrétisation de projets d’investissements directs étrangers.
Plusieurs multinationales considèrent la Tunisie comme une destination pour délocaliser ou pour créer de nouvelles activités. Réciproquement, le Sommet a été une excellente occasion pour nos entreprises, surtout celles opérant dans le secteur des services, de faire connaître leur savoir-faire et conquérir des marchés.
Nos réalisations dans le domaine des TIC ont permis à la Tunisie d’apparaître comme un leader à l’échelle internationale. Le Forum économique de Davos, dans son classement 2006, nous a placé au troisième rang sur 115 pays pour notre succès dans la promotion des nouvelles technologies. Si la Tunisie a pris très tôt le train du développement des TIC et affiche des performances reconnues sur le plan international, elle le doit au président Zine el-Abidine Ben Ali, qui a pris des initiatives pour favoriser cette révolution numérique dans le pays. C’est aussi lui qui, en 1998, a proposé à la communauté internationale la tenue du premier SMSI dont la phase finale s’est tenue à Tunis en 2005. Cette maîtrise du domaine facilite considérablement la tâche de son ministre chargé des TIC et, en même temps, le place au défi de suivre son rythme

Précisément, où en sont les réalisations ?
Les TIC constituent un maillon important de la politique nationale en faveur de la mutation vers une économie fondée sur le savoir engagée depuis 1999. Le secteur a enregistré une croissance moyenne de plus de 20 % par an entre 2002 et 2006. Sa contribution au PIB est de 8 % en 2006, contre 3,9 % en 2001. Les investissements dans le secteur ont doublé entre le IXe plan (1995-2000) et le Xe plan (2001-2006), passant de 2,5 milliards à 5,3 milliards de DT.

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Quelles ont été les principales évolutions en matière d’infrastructures ?
Il y a d’abord la numérisation totale du réseau des télécommunications. Puis le développement de l’accès Internet à haut débit et de la bande passante internationale qui a été multipliée par dix pour atteindre à 1,2 Gb/s. Nous avons aussi développé le pôle El-Ghazala des technologies de la communication et lancé le réseau de cyberparcs, dont quatre sont en cours de construction et deux autres planifiés.
En matière de développement de contenus numériques, nous avons réalisé plusieurs applications informatiques dans l’administration publique comme Sdica, Madania (délivrance de documents administratifs), Tradenet (commerce extérieur), Adeb (gestion du budget), Insaf (gestion des ressources humaines), Sinda (gestion douanière) ou Rafic (fiscalité). Nous développons le e-gouvernement et l’« administration communicante » avec des services à distance comme les déclarations fiscales, la création d’entreprises, les services postaux

Le public a-t-il facilement accès à ces services ?
Nous avons lancé le programme de l’ordinateur familial pour équiper les familles et les étudiants. Plus de 600 espaces publics sont dédiés au développement de l’accès à Internet. Les universités, les centres de recherche, les lycées, la presque totalité des écoles, les bibliothèques nationales sont aujourd’hui connectés à Internet. Nous avons mis en place l’Université virtuelle de Tunis. Nous avons aussi créé un réseau de centres informatiques pour l’enfance à raison d’une unité dans chacun des vingt-cinq gouvernorats.
Côté secteur privé, nos sociétés des services et d’ingénierie informatiques ont une présence internationale, et une industrie de logiciels, de contenus multimédia et de contenus en ligne s’est développée. Les centres d’appels se sont multipliés. Et des industries d’équipements à forte valeur ajoutée se sont installées en Tunisie, comme Omniacom, Sagem, etc.

Quels sont les objectifs en matière de TIC pour les dix prochaines années ?
D’abord développer une infrastructure répondant mieux aux besoins de compétitivité de l’économie nationale. Le secteur doit contribuer à la mutation vers une économie du savoir. Nous visons une plus grande présence du secteur privé, à l’échelle nationale et internationale, et la promotion des partenariats public-privé.
Pour schématiser, les grandes orientations du secteur sont le développement de services innovants et diversifiés, du haut débit pour tous et partout, une grande compétitivité du secteur privé, une présence soutenue sur les marchés d’exportation et un contenu en ligne plus développé Nous visons aussi un partenariat avec les multinationales du secteur, et la mise en place de projets mobilisateurs.

Et les privatisations ?
C’est une orientation ancrée dans la politique de développement économique et social de la Tunisie et un choix qui s’inscrit dans la volonté du pays à faire des TIC un secteur porteur pour la croissance économique La privatisation n’est pas une fin en soit, c’est un moyen d’accompagner le développement du pays. Nous avons engagé la privatisation dans le secteur en 1998 avec la première opération qui a concerné la Société tunisienne d’entreprises des télécommunications (Sotetel). En 2002, nous avons attribué à un privé une deuxième licence pour l’exploitation d’un réseau GSM. En 2004, une deuxième licence de transmissions par satellite VSAT a été attribuée à une entreprise privée. En 2006, il y a eu la cession de 35 % du capital de la Société nationale des télécommunications (Tunisie Télécom) à Tecom-Dig pour 3 milliards de dinars (soit 2,25 milliards de dollars). L’introduction de la concurrence a été bénéfique pour l’opérateur historique Tunisie Télécom, un opérateur qui partage le marché du mobile avec un opérateur privé (Tunisiana) et le marché VSAT avec un autre opérateur privé (Divona).
Nous avons aussi octroyé en mars 2006 une autorisation à Tunisie Télécom et à Divona pour le déploiement de réseaux WiMax à l’échelle nationale. Un programme d’octroi de licences dans différents segments est prévu à l’issue d’une étude stratégique en cours.

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