L’Ouganda est indépendant

Publié le 6 octobre 2003 Lecture : 3 minutes.

Après soixante-huit ans d’administration britannique, l’Ouganda accède pacifiquement à l’indépendance, le 9 octobre 1962, à l’issue d’un long processus de réformes constitutionnelles. En 1945 et en 1949, la « perle de l’Afrique », comme l’appelait Winston Churchill, avait été secouée par une série d’émeutes. Bien que localisé dans le Sud, le mouvement exprimait des revendications communes à l’ensemble de la population, résolue à choisir elle-même ses chefs et, surtout, à contrôler la production de café et de coton. Objectifs limités, forces trop faibles : l’échec des émeutes pave la voie d’une indépendance pacifique.
Les partis politiques ougandais sont nés dans les années 1950, selon des lignes de partage ethniques et religieuses. En 1952, la création de l’Uganda National Congress (UNC) coïncide avec le régime d’Andrew Cohen, gouverneur aux idées progressistes, en matière d’économie comme de politique. Appuyé par l’Inde et l’Égypte, en contact avec la Chine populaire, l’UNC acquiert un temps une dimension internationale, ouvrant même un bureau au Caire en 1953. Pourtant, le premier appel sérieux à l’indépendance (mais de la seule région du Buganda) viendra du kabaka (« roi ») Mutesa II, vivement opposé à l’idée d’une fédération avec le Kenya et la Tanzanie. La réponse ne se fait pas attendre : le roi est exilé en Angleterre. Il en reviendra auréolé en 1955, mais ne mettra à profit sa popularité que dans son propre royaume.

L’UNC apparaît trop lié aux intérêts du seul Buganda, ce qui contribue à le discréditer. En 1954 naît le Democratic Party (DP), d’obédience catholique, puis, l’année suivante, le Progressive Party (PP), attaché à la défense des privilèges des protestants. En 1959, c’est un parti opposé à la prééminence du Buganda qui voit le jour, l’Uganda People’s Union (UPU). En mars de l’année suivante, ce dernier accueille en son sein des membres de l’UNC et forme l’Uganda People’s Congress, proche du PP et conduit par Milton Obote. La double opposition entre les catholiques et les protestants, d’une part, le Buganda et le reste du pays, de l’autre, ne disparaîtra pas de sitôt.
Le début des années 1960 est marqué par la naissance de nombreux partis aux revendications particulières, notamment le Kabaka Yekka (KY, « The Kabaka forever »), protestant et pro-Buganda. Comme l’écrit Samwiri Lwanga-Lunyiigo : « Il n’existait pas de héros national, et les prétendus combattants de l’indépendance ne firent que suivre le programme de décolonisation du gouvernement colonial. » En 1956, celui-ci promet que des élections directes seront organisées cinq ans plus tard.

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En 1958, le gouverneur sir Frederick Crawford met en place un comité constitutionnel qui établit un principe de suffrage universel fondé sur la résidence en Ouganda pendant plus de cinq ans et recommande la mise en place du « modèle Westminster », comprenant un cabinet responsable devant le corps législatif. Si le texte accorde encore un droit de veto au gouverneur, l’intention d’octroyer l’indépendance existe bel et bien. Par la suite, la Munster Commission, créée en 1960, suivra la volonté du Buganda en suggérant un régime semi-fédéral pour les royaumes de l’Ouest, fédéral pour le Buganda, et des relations unitaires pour le reste du pays. En octobre 1961, le DP l’emporte et Benedicto Kiwanuka devient le premier chef du gouvernement autonome d’Ouganda. Aux élections d’avril 1962, l’union contre nature entre l’UNC et le KY permet à Milton Obote de conduire son pays à l’indépendance, sur la base d’une Constitution élaborée à grand-peine par le colonisateur.
Très vite, l’Ouganda se révèle difficile à gouverner. En 1966, la Loi fondamentale sera abolie, ce qui ouvrira la voie aux dictatures d’Obote I, Idi Amin Dada et Obote II. Aujourd’hui encore, c’est le danger de la division qu’invoque le président Yoweri Museveni pour justifier le maintien d’un système de parti unique.

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