L’Afrique du Sud, ça suffit !

Publié le 6 octobre 2003 Lecture : 2 minutes.

J’ai perdu ma chemise et j’ai mangé mon chapeau. Ça m’apprendra à prendre des paris sur le nom du lauréat du Nobel de littérature. Il y a plusieurs mois que j’annonce urbi et orbi que le cru 2003 sera attribué à la Néerlandaise Hella Haase…
– Qui ?
– Comment ça, qui ? Cette charmante dame, qui va vers ses quatre-vingts printemps, a écrit plus d’une quinzaine de romans, tous parfaitement honorables, tous traduits en français.
– Et alors ?
– Et alors, elle occupait une place de choix en mars dernier quand le Salon du livre de Paris mit à l’honneur les écrivains de Flandre et des Pays-Bas. Mais non, ce n’est pas anecdotique, cessez de m’interrompre : tout élève de Bourdieu vous dira que Paris reste le coeur de la circulation du capital littéraire mondial. Pas de légitimité pour le nobélisable albanais ou chinois sans un détour par Saint-Germain-des-Prés ! Enfin, répétons-le, Hella Haase est une femme, et c’est bien leur tour de recevoir le fameux coup de fil de Stockholm. Bref, j’avais noté sur un calepin les dizaines de paris pris sur le nom du vainqueur et j’attendais avec confiance le jour J. Par ici, la monnaie !

Patatras ! Les Suédois se sont emmêlé les pinceaux. Le prix va à Coetzee. Je n’ai rien contre ce monsieur, dont j’ai lu avec intérêt le dernier ouvrage, mais, franchement, l’Afrique du Sud, y en a marre. Ils raflent tous les prix, ils ramassent toutes les distinctions, on leur fait partout des mamours, on déroule sous leurs pieds le tapis rouge. Ils vont même piquer l’organisation de la Coupe du monde 2010 alors que le Maroc ou la Tunisie la méritent tout autant. Tout cela à cause, ou plutôt grâce à Mandela. On étreint Coetzee pour mieux embrasser Mandela. OK, Mandela, c’est l’Africain du siècle (j’ai voté pour lui), c’est un immense bonhomme, un modèle pour tous les hommes. Mais le Sud-Africain de la rue, c’est qui ? Allez-y faire un tour, vous reviendrez effrayés. Les millions de racistes boers sont toujours là, la ségrégation se perpétue dans le plan des villes et la violence est omniprésente. Le matérialisme y règne sans partage et la corruption n’est pas loin. Mandela est trop grand pour les Sud-Africains, il leur sert de cache-misère ou de mur de la honte, mais en fait il ne leur appartient pas, il est à nous tous. Tiens, voilà un bon slogan… Mandela est à nous ! Mandela est à nous !
Vous entendez, Stockholm ?

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