Au nom du père, le fils…

Le congrès annuel du parti au pouvoir, qui s’est tenu du 26 au 28 septembre, a confirmé l’ascension de Gamal Moubarak.

Publié le 6 octobre 2003 Lecture : 3 minutes.

Plus rien ne semble arrêter la fulgurante ascension de Gamal Moubarak. Intronisé par son père, en 2002, à la tête du conseil politique du Parti national démocratique (PND, au pouvoir) à l’âge de 39 ans, il détient depuis la haute main sur les dossiers les plus sensibles : agenda politique, stratégie de développement économique, amélioration de l’image du parti. Et se permet même parfois des incursions sur le terrain de la diplomatie. Ces douze derniers mois, il a ainsi effectué de nombreuses visites dans les capitales européennes et à Washington pour le compte du raïs. « Gamal est celui par lequel la réforme et la modernisation peuvent intervenir », clament de jeunes militants du PND acquis à un scénario à la syrienne : Gamal succédant à Hosni. Les caciques du PND, à commencer par des personnalités comme Safwat Cherif, inamovible ministre de l’Information, Fathi Sourour, le président du Parlement, ou Atef Abid, le Premier ministre, se sont effacés devant l’offensive du fils cadet.
Au vu de la morosité de la conjoncture (une inflation à deux chiffres, une dépréciation de la monnaie de près de 30 % depuis le début de l’année et une aggravation de la pauvreté, passée de 12 % à 17 % de la population), les assises du PND, tenues au Caire du 26 au 28 septembre, devaient donner lieu à un débat économique. Seulement, il se trouve que cette mauvaise passe est due, en grande partie, à des décisions libérales prises par le gouvernement sur recommandation expresse du conseil politique… dirigé par Gamal Moubarak. L’abandon du taux de change fixe qu’il a réclamé à cor et à cri – et obtenue en début d’année – a depuis entraîné la chute de la livre égyptienne par rapport au dollar (1 dollar = 7,20 livres aujourd’hui contre 5,30 auparavant).
Moyennant quoi Gamal a utilisé ses relais dans le parti pour axer le congrès sur la nécessité de réformes politiques : ouverture d’un dialogue avec les autres formations et avec la société civile ; respect des droits de l’homme en général et de ceux de la femme en particulier. Certaines sources lui attribuent même l’initiative de l’ouverture du débat sur l’état d’urgence, en vigueur depuis l’assassinat du président Anouar el-Sadate, en octobre 1981. Impliquant l’omniprésente armée égyptienne et dépassant les prérogatives du seul PND, ce dossier semblait trop grand pour le novice Gamal, qui a donc laissé à son père le soin de l’aborder. À la fin des travaux, le président Moubarak a non seulement appuyé les réformes politiques préconisées par son fils, mais il a également annoncé un allègement du dispositif de l’état d’urgence.
Présentées comme l’acte fondateur d’une nouvelle ère, les assises du PND n’auront fait que confirmer Gamal Moubarak en dauphin putatif d’un « monarque » qui ne semble pas pressé de quitter le palais d’el-Qouba, siège de la présidence. Hosni Moubarak aura 75 ans en 2005, année de la prochaine élection présidentielle. Quant aux réformes politiques promises, elles ne constituent pas une concession majeure du PND mais une nécessité face à une société en pleine mutation. Les intellectuels, si prompts à faire allégeance au puissant du moment, c’est-à-dire Moubarak depuis deux décennies, prennent leurs distances avec un pouvoir corrompu. Cependant, cela s’explique plus par des facteurs exogènes. L’occupation de l’Irak et l’évolution du dossier palestinien marquent un net recul du poids de l’Égypte dans la sous-région. Ce qui traumatise les éditorialistes, les cinéastes et les écrivains. Et si le patronat semble être derrière Gamal Moubarak, il ne fera rien pour s’aliéner les autres prétendants, dont le plus en vue est Omar Souleymane, chef des services secrets, bien perçu à Washington et à Tel-Aviv. Quant à la classe politique, elle attendra patiemment l’ouverture du dialogue promis. Qui sait, il restera bien quelques miettes à partager !

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