Triomphe de la méthode douce

La libération des infirmières bulgares marque le succès d’une nouvelle forme de diplomatie qui privilégie le réalisme économique. Analyse.

Publié le 6 août 2007 Lecture : 2 minutes.

La libération des infirmières bulgares et du médecin d’origine palestinienne détenus en Libye marque la victoire d’une nouvelle stratégie mise en place par l’Union européenne (UE) depuis dix ans pour assouplir la position de régimes comme celui de Tripoli.
Leur libération est liée à la volonté de Mouammar Kadhafi d’approfondir des relations nouées avec l’Occident au milieu des années 1990. Elle est le fruit de longues négociations menées par la Grande-Bretagne, la France et l’UE, qui ont utilisé une méthode douce privilégiant les intérêts économiques au détriment des questions morales. Kadhafi a reçu beaucoup d’argent pour indemniser les familles de victimes, la promesse d’une normalisation des relations économiques de son pays avec l’UE ainsi que celle d’une visite du président français, quelques semaines seulement après l’escale de Tony Blair, en mai.
En échange, la Bulgarie a récupéré ses infirmières et les entreprises françaises ont obtenu d’installer une usine de désalinisation d’eau de mer. Quand on y ajoute les généreux contrats pétroliers et d’armement déjà signés par la Grande-Bretagne et une certaine satisfaction du devoir accompli à Bruxelles, presque tout le monde sort gagnant de l’affaire. La clef de voûte du succès européen réside dans un principe simple : si le renversement d’un gouvernement hostile est impossible, il faut le faire changer d’avis.
La stratégie développée par l’Europe pour parvenir à ses fins dans cette affaire – conduire un régime à LIBYE La libération des infirmières bulgares marque le succès d’une nouvelle forme de diplomatie qui privilégie le réalisme économique. Analyse. se réformer en douceur plutôt que le contraindre à un changement brutal – ne convient ni aux vierges effarouchées qui se drapent dans la morale, ni aux ayatollahs de l’idéologie. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les « néocons » et les défenseurs des droits de l’homme se sont, cette fois, retrouvés pour dénoncer une « victoire » qui ne serait rien d’autre que le paiement d’une
rançon – et n’aurait pour seul résultat que de renforcer undictateur.
Ainsi va la diplomatie : tout dirigeant doit prendre des décisions difficiles et les défendre devant son opinion quand elles sont critiquées. L’UE sera donc toujours à la merci des gouvernements nationaux qui la composent et l’une de ses tâches est de concéder la gloire politique à ceux qui – tel Nicolas Sarkozy – prennent le plus de risques. C’est pourquoi la méthode douce est peut-être plus délicate – et, moralement, plus problématique – que la méthode dure, faussement simple.

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