Afghanistan : les quatre vérités des députés britanniques

Publié le 6 août 2007 Lecture : 3 minutes.

Etonnants, ces parlementaires britanniques ! Si l’on en jugeait uniquement par les publications de la commission de défense de la Chambre des communes, on pourrait croire qu’ils accordent plus d’importance à leur engagement en Afghanistan qu’à leurs opérations sous commandement américain en Irak. Quoi qu’il en soit, il convient de souligner tant la valeur du rapport publié le 18 juillet que le courage de ses auteurs. Contrairement à nombre de leurs collègues à travers le monde, ils ne pratiquent vraiment pas la langue de bois !
Les militaires britanniques sur place sont chaudement félicités, leurs soixante-trois morts et leurs nombreux blessés salués et déplorés. Mais les autres en prennent pour leur grade !
La première visée est la communauté internationale, qui n’a pas compris l’ampleur des problèmes auxquels l’Afghanistan est confronté. Il faut savoir que, dans ce pays, un bébé sur six meurt au moment de la naissance, un enfant sur cinq meurt avant l’âge de 5 ans et 13 % seulement de la population a accès à l’eau potable Les auteurs estiment donc que l’engagement international devrait être, financièrement et militairement, « considérablement augmenté ».
Le ministre britannique de la Défense n’est pas épargné en raison de sa propension à minimiser les problèmes : n’a-t-il pas affirmé que « l’insurrection des talibans ne constitue pas une menace stratégique [] même si des individus violents et dangereux y participent » ? Quant aux gouvernements des pays membres de l’Otan, certains manifestent une regrettable « répugnance à fournir des troupes », ce qui « mine la crédibilité de l’organisation et l’efficacité des opérations de la Force internationale ».

Complexité des structures, manque de stabilité des responsables
Au mois de juin dernier, les effectifs déployés en Afghanistan dans le cadre de ladite Force étaient de 36 750 hommes, venant de 37 pays. Au fil des ans, leur commandement a été assuré par dix pays, sur la base d’une rotation tous les six mois (tous les neuf mois, désormais). L’instabilité reste grande et les rédacteurs du rapport proposent, d’une part, que la durée du « tour opérationnel » soit sensiblement prolongée pour les officiers de haut rang assumant d’importantes responsabilités, et, d’autre part, que le gouvernement britannique « incite les Nations unies à nommer un responsable de haut niveau pour coordonner l’effort international » de soutien au gouvernement afghan.

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Insuffisance des équipements
Le rapport note avec satisfaction l’augmentation du nombre des hélicoptères déployés, mais juge que le potentiel de ces appareils demeure très insuffisant. Par ailleurs, l’appui aérien aux opérations alliées demeure, lui aussi, insuffisant, mais également trop complexe. Les parlementaires déplorent que l’appui aux forces terrestres britanniques soit assuré, de manière aléatoire, par des avions néerlandais ou américains, alors que le recours à la Royal Air Force ou la Royal Navy leur paraîtrait préférable. Enfin, l’absence d’un véritable pont aérien entre le Royaume-Uni et l’Afghanistan est très préjudiciable au moral des troupes.

L’hostilité des civils
Le rapport rappelle qu’il est difficile d’évaluer avec précision le nombre des pertes civiles provoquées par l’engagement de la Force internationale. Certains parlent de mille tués en 2006 Quoi qu’il en soit, « les pertes civiles compromettent l’appui des populations et alimentent l’insurrection ». Les chiffres régulièrement rendus publics concernant les pertes des talibans ne doivent pas faire illusion, car « parmi les tués, beaucoup n’appartiennent pas au noyau dur des talibans, mais sont de simples fermiers payés pour combattre ».
Enfin, la reconstruction du pays est un échec patent. Certes, l’argent arrive en Afghanistan, mais il est rarement transféré dans les zones qui en auraient le plus besoin, généralement à cause des dangers de l’opération. Quant à la lutte contre la culture du pavot, elle est à peu près totalement inefficace, faute de fournir aux agriculteurs des revenus de substitution.

* Président du Collège des experts du Haut Comité français pour la défense civile.

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