Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 6 juin 2005 Lecture : 4 minutes.

Train de l’espoir contre train de l’enfer
Jacques Chirac a eu raison de soumettre à référendum la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe. En la refusant, les Français nous ont permis de voir la réalité en face. Dans son for intérieur, Chirac savait que ce texte, élaboré par son ennemi intime Valéry Giscard d’Estaing, était mauvais. Le bon choix était donc de laisser au peuple, qui a fait preuve d’une grande maturité politique, la responsabilité de refuser la fatalité. Aller contre le cours général des choses mène parfois à des succès.
Le président français a courageusement refusé d’avaliser la guerre en Irak, il peut en être fier. Il a aussi ouvert la voie à une autre politique qui permettra, peut-être, d’éviter une catastrophe écologique. L’économie mondialisée est installée dans un « train de l’enfer » qui roule à vive allure sur une voie unique menant à un précipice. La France ouvre le chantier de construction d’une voie de secours, pour lui donner une chance de bifurquer et d’éviter la catastrophe. Reste à prendre les bonnes décisions pour qu’il se transforme en « train de l’espoir ».

Z comme zaïrianisation
J’ai lu avec grand intérêt les pages traitant de la privatisation des entreprises en Afrique (voir J.A.I. n° 2314). Toutefois, un terme a retenu mon attention, celui de « zaïrisation ». En tant que Congolais, et donc ex-Zaïrois, je suis né et j’ai grandi sous le règne dictatorial du pseudo-maréchal, feu Mobutu Sese Seko. Je suis de ceux qui ont subi l’éducation aussi bien civique que politique enseignée dans toutes les écoles, pour plaire au régime. On devait apprendre par coeur la doctrine du parti-État. Je me souviens que, lorsque les enseignants nous parlaient des « trois Z », Zaïre notre pays, Zaïre notre fleuve et zaïre notre monnaie, ils nous expliquaient aussi un quatrième Z. Il s’agissait de la fameuse « zaïrianisation ». On peut continuer à faire des néologismes et employer « zaïrisation » aussi bien que « zaïrianisation », mais c’est le second terme qui est exact.

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Les mots de Dieudonné
À la violence des mots prononcés par le comique Dieudonné sur les Juifs et la traite négrière a répondu la violence des poings. La suite logique serait : la violence des armes. Faut-il en arriver là pour que la souffrance du peuple noir soit reconnue à sa juste valeur ? Moi aussi j’aimerais qu’on parle pendant des journées entières, sur les chaînes de télévision, de la traite des Noirs, de la colonisation, du génocide rwandais, du massacre des civils ivoiriens. Se peut-il que le terrorisme soit le seul miroir face auquel les États reconnaissent leur culpabilité vis-à-vis du continent africain ?

Conversions en Algérie : des actes isolés
Je pense que la vague de christianisme qui déferle sur l’Algérie est loin d’être un phénomène inquiétant pour l’avenir de l’islam. Elle n’intéresse que quelques Algériens, traumatisés et fragilisés par le terrorisme dit islamiste qu’a connu le pays et dont les auteurs ne représentaient qu’eux-mêmes et leur cruauté bestiale. Le retournement religieux répond à un comportement réactionnaire, à la perte cruelle d’un ami, d’un père ou d’un fils. Ce sont des actes isolés et transitoires, qui ne doivent pas inquiéter.

L’Afrique se trouve en panne de courage politique face à elle-même. Panade
au Sénégal
Les héritiers de Léopold Sédar Senghor et d’Abdou Diouf sont-ils dans l’impasse quant à l’héritage reçu ? Les soubresauts que connaît le parti au pouvoir depuis l’alternance du 19 mars 2000 ont des conséquences sur la population sénégalaise. Ils laissent entrevoir une réelle confusion entre « esprit libéral » et « esprit de libertinage ». Le premier terme est favorable aux libertés politiques et individuelles, le second traduit une manière de vivre dissolue. Ce qui se passe actuellement dans la politique sénégalaise entache l’image de notre démocratie et pourrait bien hypothéquer l’avenir.

Leçon d’humilité
C’est une leçon d’humilité qui a été infligée au président français Jacques Chirac, lui qui, dans un passé récent, s’était cru permis de faire la leçon au président sud-africain Thabo Mbeki. Les Africains peuvent lui donner deux conseils : « apprendre » les Français, car il semble bien mal les connaître, et prendre sa retraite, car il est « aux affaires » depuis près de quarante ans.
S. Kouamé,
Abidjan, Côte d’Ivoire

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Manipulation ou pas ?
À la suite de votre article sur Mohamed al-Dura (voir J.A.I. n° 2298), le jeune Palestinien mort en direct dans les bras de son père en septembre 2000, je voudrais vous signaler que je suis l’auteur du seul livre qui existe sur ce dossier, intitulé Contre-expertise d’une mise en scène (2003, éditions Raphaël).

Quelle vision pour l’Afrique ?
Le rejet du projet de Constitution européenne par la France marque une rupture entre la vision, jugée trop libérale, des hommes politiques et les attentes du peuple. Celui-ci avait le pouvoir d’intervenir sur son destin, il s’en est servi. Face à cela, combien d’Africains se sentent interpellés ? Bien peu, hélas, car on estime généralement que ce n’est qu’une péripétie de la vie politique française, une tempête dans un verre d’eau. Pourtant, il demeure un projet intéressant, celui d’États économiquement forts qui s’unissent pour faire face aux défis d’un monde en mutation. Quel est celui qui pourrait, nous Africains, nous mouvoir vers notre survie ? De quels leviers disposons-nous pour représenter mieux que nos 2 % du commerce mondial ? Qu’envisage Koumba Yala, par exemple, pour les Bissauguinéens qui dépendent, comme des millions d’autres Africains, de la générosité de Bill Gates pour se prémunir contre le paludisme ? Faute de vision porteuse, nous resterons les néocolonisés de cet autre Yalta qui se dessine sous nos yeux.
Cyprien Kibangou, Abidjan, Côte d’Ivoire

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