Kadhafi libère les « Frères »

Publié le 7 mars 2006 Lecture : 2 minutes.

Mouammar Kadhafi a, le 2 mars, à l’occasion du 29e anniversaire de l’instauration de la Jamahiriya, libéré une partie des prisonniers politiques libyens : quatre-vingt-quatre islamistes proches des Frères musulmans. Le 25 janvier, l’organisation humanitaire Human Rights Watch estimait le nombre des détenus d’opinion en Libye, toutes tendances confondues, à 132. Quelques jours auparavant, les autorités tunisiennes avaient libéré plus de 1 600 prisonniers, parmi lesquels plusieurs dizaines d’islamistes (voir pp. 44-45). En Algérie, plus de 2 000 islamistes ont déjà bénéficié de la Charte de paix et de réconciliation, dont les décrets d’application ont été promulgués le 1er mars (voir ?pp. 46-47), et ont été élargis. Curieuse coïncidence.
La décision du « Guide » libyen est en revanche une sorte de pied de nez à l’adresse de Hosni Moubarak, qui se trouvait à Tripoli le 28 février pour une visite éclair : on sait que le raïs s’efforce, plutôt mal que bien, de juguler la montée en puissance des Frères musulmans égyptiens Mahdi Akef, leur chef, s’est d’ailleurs empressé de saluer la clémence Kadhafienne.
Les 84 ex-détenus étaient en prison depuis 1998. Ils avaient été arrêtés, à Benghazi, avec quelques dizaines d’étudiants et de membres des professions libérales (152 interpellations, au total), accusés d’appartenance à un parti politique (ce qui, selon la loi libyenne, équivaut à un crime de haute trahison), en l’occurrence El-Jamaa el-Islamiya el-Libya, la section libyenne des Frères musulmans. En 2002, ils avaient été jugés par une juridiction spéciale aujourd’hui dissoute. Deux d’entre eux avaient été condamnés à la peine capitale, soixante-treize à la réclusion criminelle à perpétuité et neuf à une peine de dix années de réclusion.
La subite mansuétude de Kadhafi répond, bien sûr, à un calcul politique. Contrairement aux djihadistes (aucun détenu soupçonné d’appartenir à cette mouvance n’a été élargi), les « Frères » sont partisans d’une action pacifique, voire d’une certaine passivité politique : ils s’efforcent d’islamiser la société à la base. Elle coïncide par ailleurs avec une intensification des pressions internationales sur la Libye, accusée de se soucier comme d’une guigne des droits de l’homme et des libertés publiques. Échaudé par le sort réservé à Saddam Hussein, Kadhafi ne sait plus quoi faire pour s’attirer les faveurs des dirigeants occidentaux, notamment américains.

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