En bout de piste

Les autorités confirment la liquidation de la compagnie nationale et la création d’un nouveau pavillon en partenariat avec la RAM.

Publié le 7 mars 2006 Lecture : 3 minutes.

Depuis l’élection présidentielle du 27 novembre dernier et la victoire attendue d’Omar Bongo Ondimba, le dossier Air Gabon a connu une nette accélération. Mais le sort qui attendait la compagnie nationale est resté le même. Plombée par une gestion calamiteuse, une dette estimée à 35 milliards de F CFA, des effectifs pléthoriques et une flotte à bout de souffle, Air Gabon agonisait depuis plusieurs mois. Le 25 février, le porte-parole du gouvernement, René Ndemezo’Obiang, a donc confirmé ce qui était devenu inéluctable : la liquidation de la compagnie au « perroquet vert » créée en 1977. Avec, en ligne de mire, la création prochaine d’Air Gabon International (AGI), détenue à 51 % par la Royal Air Maroc (RAM), sur le modèle d’Air Sénégal International. « Nous entrons dans une phase transitoire, mais nous souhaitons qu’elle soit le plus brève possible, entre trois et six mois, précise Ndemezo’Obiang. En attendant l’issue des discussions avec la partie marocaine, les liaisons avec la France et les vols domestiques sont maintenus. » Depuis plusieurs semaines déjà, les deux rotations hebdomadaires entre Libreville et Paris sont en effet assurées, mais par un appareil de la RAM, un Boeing 757-200 affrété par l’État gabonais. Un avant-goût.
« Nous attendons notre lettre de licenciement, mais nous n’en savons pas plus. Nous avons appris cette liquidation par la presse et en découvrant le communiqué du gouvernement, déplore une salariée d’Air Gabon, qui fait partie de l’équipe dirigeante. Nous ne savons pas combien d’entre nous seront conservés. » Bien peu, semble-t-il. Sur les 1 100 employés actuels, AGI devrait en embaucher entre 300 et 450. « Cet effectif de départ est raisonnable, admet le porte-parole du gouvernement. Cette nouvelle compagnie ne doit pas tomber dans les mêmes travers, mais nous veillerons à ce que le personnel licencié soit prioritaire. Pour les autres, ils seront correctement indemnisés et des reconversions leur seront proposées. Nous espérons que les compagnies privées travaillant déjà au Gabon et desservant les différentes villes du pays pourront en reprendre. »
Des négociations ont débuté, et le plan social est évalué à une dizaine de milliards de F CFA. « Outre les mesures de reclassement et le montant des indemnisations, nos inquiétudes portent surtout sur les réelles intentions de la RAM, qui ne semble pas vouloir reprendre toutes nos activités, déclare Maixent Hubert Ndong Odzame, patron du Syndicat du personnel d’Air Gabon (Sypag). Mais il est impossible de connaître le contenu du document final. » Si la RAM apporte dans la corbeille ses propres avions, l’assistance au sol et la gestion des escales pourraient être externalisées. Et si AGI doit maintenir les dessertes internationales, dont les principales capitales ouest-africaines, il paraît certain que les vols domestiques seront abandonnés. L’emblème national aura vécu. Cela ressemble fort à la chronique d’un crash annoncé.
Dès 2000, un premier audit tire la sonnette d’alarme. En juin 2004, à son arrivée, le directeur général, Jérôme Ngoua Békalé, dresse un constat inquiétant : « Air Gabon est une compagnie en très mauvais état. » En avril 2005, le Premier ministre, Jean François Ntoutoume Emane, la déclare « en cessation de paiements », tandis que plusieurs appareils sont cloués au sol en raison de pannes moteur. Quelques jours plus tard, le président Omar Bongo Ondimba confirme cette mort programmée au profit d’une société privée. Les Marocains sont sur les rangs. Le « nouveau-né » s’appellerait déjà Air Gabon International. En juin, le gouvernement reprend l’intégralité de la dette et assure le paiement des employés. En septembre, les perfusions financières ne suffisent plus. Les autorités doivent de nouveau mettre la main à la poche pour louer un Airbus A-330 afin de reprendre les liaisons avec la France, interrompues trois mois plus tôt. Le contrat de location d’un Boeing 767 arrivé à expiration n’avait pas été renouvelé, faute de liquidités. « Tous ces efforts ont été consentis pour donner meilleure allure à la mariée », faisait alors remarquer un proche du dossier. La campagne électorale et la présidentielle passées, Libreville a préféré attendre pour publier les bans de mariage. « Cette nouvelle compagnie et ce partenariat avec la RAM sont une très bonne chose », se réjouit le porte-parole du gouvernement.

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