Télécoms : Eto’o n’a plus de batterie

Management instable, stratégie peu lisible, manque de réactivité… L’entreprise de télécommunications lancée en 2012 par le sportif camerounais est à l’agonie.

Set’Mobile, l’opérateur de réseau mobile virtuel, a été lancé au Cameroun par Samuel Eto’o en septembre 2012. © AFP

Set’Mobile, l’opérateur de réseau mobile virtuel, a été lancé au Cameroun par Samuel Eto’o en septembre 2012. © AFP

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Publié le 3 février 2014 Lecture : 3 minutes.

Les affiches et parasols estampillés Set’Mobile se font rares dans les call-box, ces points de revente fixes de crédits de communication qu’on trouve à Douala et Yaoundé. « J’ai rangé ma puce à la maison depuis des mois », raconte Xavier, un call-boxer établi dans le centre-ville de la capitale camerounaise. L’un de ses confrères continue de s’approvisionner, mais à hauteur de 5 000 F CFA (7,60 euros) mensuels seulement, car « c’est à peine si deux à trois clients par mois demandent encore du crédit Eto’o Télécom », souffle-t-il.

Lisibilité

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Lancé officiellement en septembre 2012 – un concert géant avait même été organisé à Douala dès la fin de l’année 2011 -, Eto’o Télécom, l’opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO) de la star du football camerounais, est désormais à l’agonie. Envolés les objectifs de 3 % de parts de marché en 2014 et de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires.

« Le principal péché de Set’Mobile [la marque utilisée par Eto’o Télécom] réside dans son manque de lisibilité par le marché. Il a voulu jouer sur le même terrain que les leaders alors qu’il aurait pu se positionner sur des niches intéressantes (ethnies, jeunes…) », résume Robert-Martin Silo-Samé, cofondateur de Sisaroma, un cabinet spécialisé dans les télécommunications.

Management

Minée par des problèmes de management, l’entreprise n’a jamais décollé. « Au moment du lancement, la société vendait des puces mais n’était pas encore en règle, confesse un des proches de l’avant-centre de Chelsea. Ces problèmes administratifs ont retardé le démarrage des activités de deux mois. » Entre-temps, les deux leaders Orange et MTN se sont organisés, baissant leurs tarifs à 50-60 F CFA la minute, contre 70 pour Set’Mobile. « Un réajustement du prix a été maintes fois proposé, mais les décideurs ne voulaient rien entendre », avoue un ancien cadre. Il faudra plus d’un an pour ramener le prix à 40 F CFA. Trop tard ?

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Ce hiatus traduit en tout cas un profond malaise dans le management. Set’Mobile a épuisé deux directeurs généraux : les Français Charles Gueret et Hervé Perrin. Sous la direction du premier, une série de licenciements et de démissions a même alimenté la chronique médiatique. Le nombre d’abonnés – près de 300 000 étaient revendiqués après une année de fonctionnement – aurait fondu comme neige au soleil.

Interrogé, le comité de gestion mis sur pied pour relancer les activités rechigne à communiquer. « Nous sommes en pleine négociation avec notre partenaire », explique son président, l’avocat Gabriel Parfait Kaldjob – « les yeux et les oreilles de Samuel Eto’o » selon un ex-employé – pour esquiver les questions de Jeune Afrique.

Pourparlers avec Orange

Entamés depuis quelques mois, les pourparlers avec Orange Cameroun – qui loue son réseau à Eto’o Télécom – piétinent. En cause, une lecture divergente de la situation. L’opérateur virtuel traînerait une ardoise de près de 300 millions de F CFA auprès de son partenaire. Pour la filiale du français, l’estimation de la valeur actuelle – et donc de la solidité – de Set’Mobile constitue donc un préalable avant toute poursuite du partenariat.

« L’argent n’est pas un problème, assure-t-on dans l’entourage du footballeur. Il a les moyens de payer, mais il estime qu’il faut partir sur des bases claires. » Set’Mobile, qui redoute une absorption, aimerait explorer les conditions d’une entrée d’Orange Cameroun dans son capital, pour bénéficier d’une véritable assistance technique. « Samuel estime que c’est son bébé, et il n’est pas question de le céder à quiconque », avertit son entourage. En attendant qu’un terrain d’entente soit trouvé pour sauver ce qui est sa première tentative en tant qu’entrepreneur, le capitaine des Lions indomptables a trouvé de quoi se consoler en enchaînant les acquisitions immobilières à titre personnel. Dernier achat en date : la luxueuse villa de son ami Yves-Michel Fotso, à Douala…

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