Coup de poker

Ariel Sharon quitte le Likoud pour créer un parti centriste. Avec le renfort de Shimon Pérès.

Publié le 5 décembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Ce n’est pas parce qu’Ariel Sharon a quitté le Likoud pour créer un nouveau parti prétendument centriste baptisé Kadima (« En avant ») qu’il ne reste pas likoudnik dans l’âme. L’objectif du chef du gouvernement israélien est de se faire réélire lors des élections législatives du 28 mars 2006. La manoeuvre est politique et tactique : elle ne signifie pas une révision de la stratégie qui est la sienne depuis des décennies.
C’est ce qu’il faut garder à l’esprit pour interpréter les propos ambigus tenus par Eyal Arad, l’un de ses principaux conseillers, au lendemain de la rupture officielle du 21 novembre. Selon ce dernier, Sharon aurait, dans ses négociations avec les Palestiniens, renoncé au principe « paix contre territoires » au profit d’un autre : « sécurité pour l’indépendance ». Or c’est le principe « paix contre territoires » qui fut à la base de tous les contacts entre Palestiniens et Israéliens depuis les accords d’Oslo jusqu’aux pourparlers de Camp David en 2000.
Les propos d’Arad ont été tenus au cours d’un débat où il s’est efforcé d’expliquer que Sharon s’opposait à la fois à l’extrême droite du Likoud, en renonçant au « rêve moralement juste » du Grand Israël et en acceptant la nécessité d’un État palestinien, et aux partisans des accords d’Oslo. Selon lui, le principe « paix contre territoires » s’est révélé « faux philosophiquement et naïf politiquement ».
La question qui se pose est donc de savoir si Sharon envisage également de tourner la page de la « feuille de route » signée par le Quartet (États-Unis, Union européenne, Russie et ONU) – et que lui-même a acceptée, sous conditions. Car cette « feuille de route » pose qu’un accord entre Israéliens et Palestiniens devra précisément être fondé sur le principe « paix contre territoires » et sur la résolution 242 de l’ONU qui exige le retour aux frontières de 1967.
Pour Arad, les discussions sur l’indépendance ne pourront s’engager qu’après « le démantèlement total des organisations terroristes » par les dirigeants palestiniens. D’un côté, le mot « indépendance » et la mention d’un État palestinien devraient permettre de gagner des électeurs à gauche. De l’autre, le renoncement au principe « paix contre territoires » peut laisser espérer aux anciens du Likoud qu’Israël conservera l’essentiel de la Cisjordanie. Bref, Sharon pourrait être amené à diriger un gouvernement de coalition centriste.
Le calcul semble efficace. Un sondage Haaretz-Dialog réalisé dans la foulée de la rupture indique que si les élections avaient lieu aujourd’hui, Kadima remporterait 30 sièges, le Labour, désormais dirigé par Amir Peretz, en obtiendrait 26, et le Likoud, toujours à la recherche d’un leader, seulement 15. Le renfort que, le 30 novembre, lui a apporté Shimon Pérès, le leader travailliste déchu, pourrait conforter encore la position de Sharon.

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