Charles Konan Banny
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Si le choix du Premier ministre ivoirien relevait uniquement de la communauté internationale – particulièrement des pays directement concernés par la crise -, cet homme de 63 ans serait, depuis le soir du 31 octobre dernier, installé dans le fauteuil. Même si, non-ingérence oblige, cet adoubement demeure tacite, nul n’ignore que, de l’Élysée au siège de l’Union africaine (UA), en passant par la quasi-totalité des capitales de la région, Charles Konan Banny est considéré comme « the right man at the right place » – étant entendu que la place qu’il lui faut ne peut être que celle d’un chef de gouvernement jouissant des pleins pouvoirs, une sorte de président bis. Ce grand banquier très au fait de sa propre valeur et peu enclin à supporter la contradiction possède pour cela d’évidentes qualités professionnelles. Bon gestionnaire – de la Caistab à la BCEAO, dont il est le gouverneur depuis quinze ans, le parcours de ce diplômé de l’Essec-Paris est un quasi-sans-faute -, Konan Banny a toujours su conjuguer une solide ambition (« Je ne m’interdis jamais rien ») et une prudence en matière d’affaires ivoiriennes qui l’incite à ne sortir du bois que si le terrain lui paraît sûr. Fort peu manipulable, y compris par ses amis français (« Je ne fais pas de la politique monétaire dans des cases ou des huttes », répondit-il un jour à des administrateurs qui réclamaient une mise à la diète de la BCEAO), donc capable de tenir tête à Laurent Gbagbo, ce Baoulé issu d’une famille liée au défunt Houphouët cultive une posture de recours au-dessus de la mêlée. Membre d’aucun parti, frère cadet d’un baron respecté du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), époux d’une Nordiste (Henriette, née Bamba Massandié, chirurgienne-dentiste), apparenté aux Bétés par l’un de ses demi-frères, « CKB » a en outre l’avantage de ne pas avoir été mêlé au gâchis ivoirien de cette dernière décennie.
Une distance qui est aussi, cependant, un handicap. Outre le fait que l’étiquette de « candidat de la France » n’est pas, en Côte d’Ivoire, le meilleur des viatiques (elle agace
également, dit-on, le Sud-Africain Thabo Mbeki), Charles Konan Banny manque de notoriété auprès du « petit peuple » et de connaissance du terrain. Pendant toute sa vie
professionnelle, entamée en 1970, il n’a vécu que cinq ans à Abidjan, comme directeur national de la BCEAO, déroulant l’essentiel de sa carrière d’abord à Paris, puis à Dakar. À cela s’ajoutent les relations délicates que cet homme, depuis longtemps convaincu d’avoir un destin présidentiel, entretient avec Henri Konan Bédié lequel aurait, dans un premier temps tout au moins, opposé son veto à son accession la primature , ainsi que l’épineux problème de sa succession à la tête de la BCEAO. Cas de figure envisageable : la
nomination d’un intérimaire à ce poste jusqu’à l’élection ivoirienne prévue pour octobre 2006, ce qui permettrait à « CKB » de retrouver ensuite son fauteuil et de se préparer
tranquillement pour l’échéance suivante (2011). Un schéma dont l’intéressé est familier. De novembre 1990 à janvier 1994, en effet, Charles Konan Banny avait, au titre de gouverneur par intérim, remplacé un autre Premier ministre présidentiable du nom d’Alassane Ouattara. L’Histoire va-t-elle, pour une fois, se répéter ?
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