Tigre du Nil

Sous l’impulsion de Gamal Moubarak, fils cadet et successeur de plus en plus probabledu raïs, le taux de croissance avoisine 7 % par an.

Publié le 6 novembre 2007 Lecture : 3 minutes.

Aucune « révolution » n’était attendue au terme du IXe congrès du Parti national démocrate (PND), la formation au pouvoir, qui s’est tenu du 3 au 6 novembre, au Caire, en présence de plus de six mille délégués. Personne ne doutait une seconde que le président, Hosni Moubarak (79 ans), serait confirmé à la tête du parti. Et Gamal (44 ans), son fils cadet, au rang de numéro trois (secrétaire général adjoint). « Les seuls changements concerneront des postes subalternes », avait fait savoir Safwat el-Chérif, le très discret secrétaire général.
Youssef Boutros-Ghali, le ministre des Finances, avait pour sa part annoncé que le congrès dresserait le bilan des réformes économiques en cours (depuis 2004) et s’efforcerait de définir les grandes orientations pour les quinze ans à venir. Bien entendu, il ne devait pas être question des rumeurs sur l’état de santé du raïs. Et pas davantage de son éventuelle succession. Pourtant, une amorce de passation de pouvoirs était bel et bien au programme : Gamal devait parler le premier ; et son père, confirmer et préciser ultérieurement ses propos. Pour l’instant, cette répartition des rôles se limite au programme économique et social. Il y a quelques semaines, le premier a ainsi déclaré que l’Égypte devrait impérativement se doter de capacités nucléaires civiles. Le 29 octobre, le président lui a emboîté le pas en rendant publique sa décision de « construire plusieurs centrales électriques nucléaires ».

La vérité est que le gouvernement dirigé depuis juillet 2004 par Ahmed Nazif travaille en parfaite symbiose avec Gamal – sinon sous ses ordres. C’est ce dernier qui a choisi les principaux responsables économiques – notamment les ministres des Finances, de l’Investissement (Mahmoud Mohei Eddine) et de l’Industrie (Rachid Mohamed Rachid) -, dont la plupart viennent du secteur privé. Dans une vie antérieure, Gamal lui-même dirigea la Bank of America, au Caire. Son objectif : mettre en uvre les réformes libérales que son père a été incapable de promouvoir depuis son arrivée au pouvoir, en 1981. Avec lui, la « politique d’Infitah » (ouverture) a enfin trouvé son homme.
Depuis trois ans, l’équipe au pouvoir s’efforce de réduire le nombre des fonctionnaires (7 millions, pour 80 millions d’habitants) et de simplifier les procédures administratives pour la création d’entreprise, l’enregistrement des droits de propriété, les licenciements, etc. Le capital minimum pour créer une société est passé de 50 000 à 1 000 livres égyptiennes*. La fiscalité a été allégée et les droits de douane réduits de plus de moitié.
Avec l’appui des États-Unis, premier bailleur de fonds du pays, de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, l’Égypte fait ce qu’elle peut pour attirer les capitaux privés. Non sans succès. Le montant des investissements étrangers est ainsi passé de 2 milliards de dollars en 2004 à 6,1 milliards un an après, à 11,1 milliards en 2006 et à 12 milliards cette année. Dans l’industrie et la banque, on privatise à tout-va. Et on embauche à tour de bras : 1 million de personnes en 2006-2007, autant cette année. La croissance augmente aujourd’hui d’environ 7 % par an – un taux digne des « tigres » et « dragons » asiatiques. Le 25 septembre, la Banque mondiale a annoncé – pour s’en réjouir, bien sûr – que c’est en Égypte que le « climat des affaires » s’est le plus amélioré entre 2006 et 2007.
Pour Gamal Moubarak, la présence de son père à la tête de l’État (jusqu’en octobre 2012, inch’Allah) est un gage de stabilité et un rempart contre le péril islamiste. Le temps viendra, sans doute en 2011, où il sera élu président du PND et deviendra ipso facto le favori pour accéder à la magistrature suprême. D’ici là, il a deux objectifs principaux :
1. le renforcement de l’économie du marché et l’amélioration de la répartition des fruits de la croissance ;
2. l’endiguement de la poussée démographique (la population est passée de 22 millions d’habitants en 1950 à 68 millions en 2000). Pour cela, il va lui falloir convaincre les familles égyptiennes de faire moins d’enfants : de 3,1 enfants par femme aujourd’hui, à 2,1 en 2017. Dans le cas contraire, il deviendrait à peu près impossible de nourrir une population qui passerait à 100 millions en 2020 et à 118 millions en 2030.

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