Les fausses bonnes affaires marocaines de la France

Le président français se félicite d’avoir signé des contrats pour 3 milliards d’euros lors de sa visite d’État. L’addition n’est pas si simple

Publié le 6 novembre 2007 Lecture : 2 minutes.

« Nous avons signé pour 3 milliards de contrats avec Sa Majesté » : le lendemain même de son arrivée au Maroc, le 22 octobre, Nicolas Sarkozy se félicite d’avoir fait de belles affaires avec le royaume chérifien. Reprise à l’envi par la presse, la rondelette somme de 3 milliards d’euros vient opportunément dissiper le manque à gagner du Rafale, dont la vente, avortée, aurait pu rapporter quelque 2 milliards d’euros à l’avionneur français Dassault.
Mais l’addition n’est pas si simple. Contrat phare de la visite, celui du TGV est, en fait, l’aboutissement d’une coopération franco-marocaine entamée sous l’ère chiraquienne. « Nous avons commencé la réflexion sur la grande vitesse en 2003 », précise un proche du dossier. Piloté par Systra, un bureau d’études français, un schéma directeur établi en 2004 prévoit la construction de 1 500 km de voies ferrées à l’horizon 2030, en deux axes : Casablanca-Oujda, Tanger-Agadir. Or c’est seulement sur une partie de cet axe, entre Tanger et Casablanca, que porte le protocole d’accord entre la France et le Maroc Et c’est à un premier tronçon de 200 km seulement, entre Tanger et Kénitra, que correspond la somme de 1,8 milliard d’euros annoncée. Aucune négociation commerciale n’ayant commencé, elle est, par ailleurs, encore susceptible d’évoluer.

20 locomotives, 74 millions
Tel n’est pas le cas du contrat portant sur les locomotives. Signé le 23 octobre entre Alstom et l’Office national des chemins de fer (ONCF) marocain, il prévoit la livraison par le groupe français de 20 locomotives Prima pour 74 millions d’euros, entre 2008 et 2010. C’est lors d’un appel d’offres international lancé il y a quatre mois, et dont l’adjudicataire a été désigné en septembre, qu’Alstom a raflé le marché. « Mais la signature le 23 octobre est une coïncidence, explique une source à Rabat. Visite d’État ou pas, elle aurait eu lieu. »
Ce qui n’est pas une « coïncidence », en revanche, c’est l’annonce, par Alstom toujours, de la signature d’un contrat pour l’équipement de la centrale électrique de Aïn Beni Mathar, à 80 km d’Oujda, pour 200 millions d’euros. L’entreprise française opérera en sous-traitance du groupe espagnol Abener, qui a remporté l’appel d’offres en juin 2007. Reste que l’affaire avait été ficelée en août dernier et que le groupe a préféré attendre deux mois pour diffuser la bonne nouvelle. « On nous a demandé de différer l’annonce », confie une source interne au groupe.
Il s’est en revanche écoulé moins de temps concernant l’acquisition d’une frégate multimission (Fremm) fabriquée par DCNS, l’ex-Direction des chantiers navals. Une lettre d’intention a été signée au début du mois d’octobre. Pour la DCNS, le marché peut être juteux. Si le prix d’un tel produit peut évoluer, il existe une référence : un précédent contrat passé avec la Marine française portait sur la construction de 8 Fremm. DCNS avait alors engrangé 3,5 milliards d’euros, soit un prix unitaire de plus de 400 millions. Si la livraison du navire au Maroc est espérée pour 2012, il reste toutefois encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’aboutir à un contrat. À titre d’exemple, DCNS a ainsi patienté près de dix ans avant de signer avec l’Inde la construction de sous-marins Scorpène

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