Décès du président nigérien Seyni Kountché

Publié le 6 novembre 2007 Lecture : 3 minutes.

La première alerte est donnée dans la matinée du 10 novembre 1987. La radio nationale interrompt ses programmes pour diffuser un communiqué du Conseil militaire suprême (CMS), l’organe qui détient la réalité du pouvoir : « En raison de l’état de santé très préoccupant du chef de l’État, les officiers des forces armées nationales, convoqués ce mardi 10 novembre, ont décidé de confier l’intérim de la présidence du Conseil militaire suprême au chef d’état-major des forces armées nationales, le colonel Ali Seibou. » La stupeur passée, les Nigériens se perdent en conjectures. Le chef de l’État n’est-il pas déjà mort ? Ne s’agit-il pas d’un putsch déguisé ? Les supputations en sont là lorsque, à 17 h 30, le colonel Ali Seibou s’adresse lui-même à ses compatriotes pour dire que Seyni Kountché s’est éteint à 15 h 15 à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Un deuil national d’un mois est décrété.

Né en 1931 à Fandou, dans la région de Filingué Ouallam (Ouest), Seyni Kountché est un militaire de carrière. Il n’a que 13 ans lorsqu’il est admis, en 1944, à l’école des enfants de troupes de Kati (dans l’actuel Mali). Il poursuivra ensuite sa formation à l’école militaire de Saint-Louis (Sénégal) et, plus tard, à celle des officiers d’outre-mer de Fréjus (France). À la fin des années 1940, il s’engage dans l’armée coloniale française, avec laquelle il participe aux campagnes d’Indochine et d’Algérie. Nommé sergent en 1957, il sera sous-lieutenant trois ans après, lorsque le Niger devient indépendant avec, à sa tête, Hamani Diori. En 1973, il devient chef d’état-major de l’armée nigérienne. Mais le pays se porte mal. Une terrible sécheresse y sévit. Et les étudiants manifestent contre le pouvoir. C’est dans ce contexte que l’armée prend l’initiative de renverser Diori, à la tête du pays depuis son accession à la souveraineté internationale. Le chef de l’État est arrêté dans la nuit du 15 avril 1974. Deux jours après, les putschistes confient les rênes du pays à Seyni Kountché.
Petit, ascétique, autoritaire, le nouveau président imprime rapidement sa marque. Il veut rompre avec le style de son prédécesseur et remettre le Niger sur les rails. Le nouvel homme fort du pays n’hésite pas à organiser des visites inopinées au sein des services de l’État. Histoire d’en tâter le pouls. Il veut redresser l’économie, atteindre l’autosuffisance alimentaire, combattre la corruption Convaincu que « les Nigériens sont un peuple extrêmement difficile à gouverner », il estime qu’il doit les bousculer de temps en temps. « Surtout les fonctionnaires, les étudiants et les commerçants, afin qu’ils se rendent bien compte que je les ai à l’il et qu’il ne faut pas badiner avec l’État. »
Malgré toute sa bonne volonté, Seyni Kountché ne parvient pas à résoudre les principaux problèmes du pays. En cause, l’effondrement des prix de l’uranium et la sécheresse qui sévit une nouvelle fois en 1983 et en 1984. Il doit, d’autre part, affronter une révolte des Touaregs soutenus, laisse-t-on entendre, par son voisin libyen. Certains de ses frères d’armes veulent également sa tête. Ainsi échappe-t-il à trois tentatives de putsch. Sans doute grâce à sa propre baraka ainsi qu’à la fidélité à toute épreuve du chef d’état-major Ali Seibou.

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Modèle d’austérité, d’intégrité et d’abnégation, Seyni Kountché règne sans partage, même si, progressivement, il essaie de normaliser la vie politique en organisant un référendum constitutionnel, en nommant un Premier ministre civil et en réduisant le nombre de militaires au sein du gouvernement. Mais à la fin de l’année 1986, les premiers signes du mal qui va l’emporter se manifestent : grande fatigue, difficultés d’élocution Monter les marches qui mènent à son bureau devient même un calvaire. Seyni Kountché sera finalement soigné et opéré d’une tumeur au cerveau à Paris. La semaine de son décès, il s’était rendu à la Pitié-Salpêtrière pour un simple contrôle.

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