Air Sénégal International devient publique

Dakar a décidé d’augmenter le capital de la compagnie aérienne, réduisant la participation de la Royal Air Maroc, jusqu’alors majoritaire. Avec quelles conséquences ?

Publié le 6 novembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Satisfaction et inquiétude : c’est le sentiment ambivalent qui règne à Air Sénégal International (ASI) depuis l’annonce, par le ministre sénégalais des Transports, mardi 30 octobre, d’une augmentation du capital de la compagnie et d’une modification de sa répartition. Si les choses prennent la tournure envisagée par Dakar, Royal Air Maroc (RAM), jusqu’alors majoritaire avec 51 %, ne possédera plus que 25 % des parts, et l’État sénégalais verra les siennes augmenter d’autant, de 49 % à 75 %. ASI deviendra alors une entreprise publique. Au Sénégal, certains vont même jusqu’à parler de nationalisation
La recapitalisation était la seule solution pour que survive celle qui fut, dans les deux années suivant sa naissance, en 2001, le fleuron du transport aérien ouest-africain. Avec 12 milliards de F CFA de pertes cumulées fin 2006, ASI se dirigeait tout droit vers la faillite. Les 20 milliards à 23 milliards de F CFA injectés par l’État devraient permettre à la fois de combler le trou et de constituer un fonds de roulement. Autre conséquence, bienvenue du point de vue de Dakar : les postes de directeur – général, financier, technique – échoiront à des Sénégalais qui, jusqu’alors, devaient se contenter de la direction commerciale. Et surtout, à Dakar, on se réjouit de voir disparaître un actionnaire majoritaire accusé d’avoir utilisé sa filiale pour se développer et, partant, d’être le principal responsable des déboires actuels de la compagnie. Depuis 2001, la RAM a en effet ouvert de nombreuses lignes entre son hub de Casablanca et l’Afrique occidentale et centrale – elles sont au nombre de 14 aujourd’hui -, concurrençant ASI sur son propre terrain. Mais, à long terme, les perspectives sont moins réjouissantes.
Le contrôle de l’État ressuscite de vieux démons, ceux de l’époque Air Afrique et de sa gestion laxiste : billets gratuits, nominations politiques, abus de biens sociaux « Il ne faut pas que les politiques nous imposent leurs mauvaises manières », s’inquiète une source interne à ASI. Autre point d’interrogation : la RAM, dont la renommée est internationale, permettait à ASI de présenter des garanties aux banques et aux loueurs d’avions, notamment. Qu’en sera-t-il avec l’État pour actionnaire majoritaire ?
Les raisons qui ont conduit à cette décision sont encore floues. Le Sénégal ambitionne-t-il de céder une partie du capital d’ASI à un autre partenaire et de pousser ainsi la RAM vers la sortie ? Le scénario est possible à l’heure où les institutions de Bretton Woods lui recommandent de réduire les dépenses publiques. Mais encore faut-il rendre la mariée attrayante. La compagnie marocaine, qui, à deux reprises, a apporté 10 millions d’euros à sa filiale (sous forme de cash et de prêt), ne souhaitait pas mettre une nouvelle fois la main au porte-monnaie. En revanche, la RAM déclare avoir proposé en avril 2007 le schéma adopté aujourd’hui. Toutefois, la compagnie marocaine, qui a des ambitions panafricaines, se contentera-t-elle de 25 % seulement, ou ne préférera-t-elle pas, finalement, ne rien avoir du tout ?

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