Pour les Américains, c’est toujours mieux que l’Irak !

Publié le 5 septembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Le président Hosni Moubarak espère que la campagne pour l’élection présidentielle égyptienne sera perçue, au moins à Washington, comme « libre et équitable ». Mais il fallait pour cela qu’elle soit aussi brève que possible : il n’a accordé à ses neuf adversaires – tous, à deux exceptions près, de parfaits inconnus – que dix-neuf jours pour tenter de l’empêcher de prolonger d’un nouveau mandat de six ans les vingt-quatre années qu’il a déjà passées au pouvoir. L’opposition véritable, à commencer par les Frères musulmans, est presque totalement absente de la consultation, soit qu’elle ait choisi de la boycotter, soit que ses candidats aient été empêchés de se présenter. Le seul candidat d’envergure est le libéral démocrate Ayman Nour.

La télévision d’État et les journaux ont largement favorisé Moubarak, n’accordant à Nour qu’un temps de parole égal à celui dont ont bénéficié des candidats notoirement à la solde du gouvernement, comme Ahmed Awad Allah, qui ne s’est jamais caché de souhaiter la victoire du président sortant !
George W. Bush n’a présenté qu’une seule requête aux autorités égyptiennes : que le scrutin soit supervisé par des observateurs internationaux. Ce que Moubarak a catégoriquement refusé. Certains groupes égyptiens indépendants se sont alors portés volontaires pour contrôler les opérations de vote, mais leur offre a été déclinée. Quant aux juges désignés pour assurer cette mission, ils ont fini par se désister.
Le tableau semble donc bien sombre. Pourtant, la campagne a paru titiller l’intérêt de la minorité d’Égytiens qui s’intéressent à la politique. Pour la première fois depuis un demi-siècle, des opposants ont pu organiser des rassemblements publics sans être agressés par les forces de sécurité. Et on a pu entendre à la télévision nationale des critiques relativement dures contre Moubarak et son gouvernement.

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Ayman Nour a choisi de se comporter comme si les élections étaient réellement démocratiques. Même si personne ne doute de leur résultat, la campagne de Moubarak lui a été indiscutablement bénéfique. Comme pour faire oublier les carences auxquelles elle a donné lieu, il a créé un site Internet en anglais (pour être sûr qu’il soit lu à Washington), sur lequel il multiplie les promesses de réformes politiques : renforcement du rôle du Parlement, indépendance accrue de la justice, révision des lois d’urgence proscrivant toute forme d’activité politique hors des campagnes électorales, etc.
Dans ces conditions, comment l’inévitable raz-de-marée électoral en sa faveur sera-t-il reçu à Washington ? Certains responsables américains estiment que, dans le contexte égyptien, les événements de ces dernières semaines sont plutôt encourageants. Le régime a été contraint de reconnaître que beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis le temps de Nasser et d’accepter au moins le principe d’une transition vers la démocratie. La liberté n’est pas en marche, au Caire. Elle esquisse quelques pas timides dans la bonne direction. Songeant à la situation en Irak, il est possible que les Américains s’en contentent. À moins qu’ils n’aient pas l’estomac pour insister davantage.

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