« Non, tous les jeunes Marocains ne rejettent pas la politique ! »

Secrétaire d’État chargé de la Jeunesse

Publié le 5 septembre 2005 Lecture : 3 minutes.

A la fois idéaliste et pragmatique, Mohamed El Gahs (41 ans) est une figure montante de l’Union socialiste des forces populaires (USFP). Journaliste de formation – il dirigea longtemps Libération, le quotidien du parti -, il a été bombardé, en 2002, secrétaire d’État à la Jeunesse dans le gouvernement Jettou. Avec un succès inespéré. Les programmes de proximité qu’il a lancés (colonies de vacances, forums, ateliers de théâtre, promotion du sport, etc.) ont beaucoup contribué à son indiscutable popularité.

Jeune Afrique/l’intelligent : Comment développer l’offre de loisirs auprès des jeunes ?
Mohamed El Gahs : Toutes nos actions sont sous-tendues par l’idée que la jeunesse est une étape décisive qu’il faut vivre pleinement. Lorsque je suis arrivé au gouvernement, les Maisons pour jeunes – qui proposent notamment des ateliers de théâtre, d’informatique, de lecture, de musique et de cinéma – étaient à l’abandon. Nous avons fermé celles qui étaient notoirement insalubres, puis entrepris de développer les autres, en donnant la priorité aux zones rurales et défavorisées. En 2004, ces mêmes Maisons pour jeunes ont touché directement plus d’un million de personnes. Et indirectement, plus de six millions.
Il est tout à fait naturel que les jeunes aient des goûts différents. Nous leur proposons donc une multitude de manifestations très diverses. Par ailleurs, nous avons créé mille terrains de sport en un an et développé les colonies de vacances, par le biais de notre programme Vacances pour tous. De 30 000 bénéficiaires, nous sommes passés à 150 000 en 2004, puis à 200 000 cette année. Les infrastructures, les budgets, tous les moyens de l’État sont mobilisés. Mais je ne fais pas de démagogie : même dans ces conditions, il est évident que la demande est supérieure à l’offre.

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J.A.I. : Pourquoi un tel chômage chez les moins de 25 ans ?
M.E.G. : Au Maroc, l’éducation et l’enseignement sont une catastrophe. Auparavant, l’université était une sorte de « parking » où l’on entassait les étudiants. Un gros mensonge a entretenu ceux-ci dans l’idée aberrante que les études, quelles qu’elles soient, n’étaient qu’une question de temps passé, de diplômes, de grades. Et qu’à la sortie, les portes de la fonction publique leur étaient largement ouvertes. De fait, celle-ci a longtemps réussi à les intégrer – n’importe comment d’ailleurs. Mais aujourd’hui, avec la crise économique, le système est tout simplement en faillite. La formation, si l’on peut dire, n’est pas adaptée au monde du travail. Il faut une réforme radicale de l’éducation nationale. Elle a été entreprise, mais ce sera long et difficile.

J.A.I. : Les jeunes rejettent-ils vraiment la politique ?
M.E.G. : Autrefois, il était dangereux de faire de la politique et beaucoup de parents s’en abstenaient. Cela a créé un vide, et c’est dans ce vide qu’ils ont élevé leurs enfants. Le contexte a changé, le Maroc s’est démocratisé. Mais la jeunesse ne se désintéresse ni plus ni moins de la politique que dans les autres pays. Il suffit de constater le succès des Forums des jeunes que nous organisons tous les trois mois à travers le pays. Ce sont des débats publics qui réunissent des jeunes, bien sûr, mais aussi des universitaires et des représentants de la société civile autour d’un thème d’actualité comme la Moudawana, le terrorisme ou l’idée de nation. En moyenne, 170 000 jeunes participent à ces Forums, ce qui prouve leur soif de savoir, de débattre et de participer. Il faut donc nuancer : le rapport des jeunes à la politique n’est ni une exception marocaine ni un drame national.

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