Petronas tous azimuts

La multinationale conseillée par l’ancien Premier ministre Mahathir Bin Mohamad a fait du continent le théâtre principal de son développement.

Publié le 5 juillet 2004 Lecture : 4 minutes.

« L’Afrique est au coeur de notre développement, et nous comptons renforcer notre présence sur le continent », explique Hashim Wahir, responsable du département développement et allocation des ressources de la société Petronas. Ce cadre d’une cinquantaine d’années participe depuis plus de vingt ans à l’aventure du géant pétrolier malaisien, devenu un acteur incontournable du marché énergétique mondial. Le groupe opère aujourd’hui dans seize pays africains, ce qui a représenté en 2003 environ 17 % de son chiffre d’affaires, qui s’élève à 21,4 milliards de dollars.
Petronas, pour Petroliam Nasional Berhad, société d’État créée en 1974 par le gouvernement malaisien pour assurer la production et l’exploitation des ressources nationales en hydrocarbures, s’est transformée en l’espace de trois décennies en une multinationale dont les activités couvrent tous les secteurs du marché, de l’exploration à la distribution en passant par le raffinage et la pétrochimie. Le groupe détient aujourd’hui plus de quatre-vingts filiales dans une trentaine de pays. Un développement qui s’explique par une volonté affichée de s’imposer sur le marché planétaire de l’or noir, mais aussi par une logique de survie, le potentiel de 4 milliards de barils de la Fédération de Malaisie étant loin d’égaler les ressources des grands pays producteurs. « Nous avons rapidement réalisé que nos gisements ne nous permettraient pas d’approvisionner éternellement notre pays, explique Hashim. Nous avons donc décidé de faire notre entrée sur le marché mondial. »
Naturellement, le groupe s’est intéressé dans un premier temps à ses voisins asiatiques, avant de se tourner, au milieu des années 1990, vers le Moyen-Orient et surtout vers l’Afrique, très ouverte aux investissements étrangers. Soucieux de diversifier leurs sources d’approvisionnement, les Américains et les Européens sont partis à l’assaut du continent. Les Chinois tentent également de se tailler la part du lion, leurs besoins énergétiques étant à la mesure de leur croissance économique vertigineuse. Dans ce contexte d’intense compétition, Petronas est parvenu à se faire une place au soleil en mettant en avant sa bonne réputation. Le groupe arrive effectivement en tête du palmarès des sociétés asiatiques, dressé en janvier 2004 par la Far Eastern Economic Review, une référence en la matière.
L’arrivée de Petronas sur le continent s’est faite en 1996 avec l’acquisition d’une partie du capital de la société sud-africaine Engen, qu’elle détient aujourd’hui à 80 %. Engen possède actuellement quelques 1 500 stations-service dans le pays ainsi qu’une raffinerie à Durban, et contrôle Energy Africa, une filiale spécialisée dans l’exploration et la production d’hydrocarbures dans de nombreux pays subsahariens.
Mais au fil des années, c’est le Soudan qui est devenu la terre de prédilection de la multinationale malaisienne, et les relations privilégiées entre Khartoum et Kuala Lumpur ne sont pas étrangères à ce choix. Petronas est donc venu occuper l’espace laissé vacant par les sociétés américaines et européennes qui ont quitté le pays en raison de la guerre dans les régions pétrolifères du Sud-Soudan. Une aubaine pour Petronas, qui, outre la signature de nombreux contrats d’exploration et de production, a également investi le secteur de la distribution avec l’acquisition début 2003 des stations-service détenues auparavant par Mobil.
Fort de son expérience soudanaise, Petronas est parvenu à pénétrer en Éthiopie. En juin 2003, le groupe a signé un accord de partenariat avec les autorités d’Addis-Abeba pour l’exploration et la production de pétrole dans le bassin de Gambela, à l’ouest du pays. Il s’agit à ce jour de l’unique licence pétrolière accordée par le gouvernement éthiopien à une société étrangère. Cette décision est interprétée à Kuala Lumpur comme une marque de confiance. Elle prouve également que la coopération entre les pays du Sud, l’un des chevaux de bataille de l’ancien Premier ministre malaisien Mahathir Bin Mohamad, aujourd’hui conseiller de la multinationale, est devenue une réalité. « L’expérience malaisienne et le rôle joué par Petronas dans le développement de notre pays sont intéressants pour les pays africains, » estime Hashim.
Autre région phare pour le groupe : l’Afrique du Nord. Outre l’exploration qu’il poursuit au Maroc, Petronas possède des intérêts importants dans des gisements de gaz algériens et égyptiens. La proximité du marché européen et la possibilité d’acheminement outre-Atlantique ont sans conteste motivé son implantation au Maghreb.
Soucieux de renforcer sa présence dans le nord et l’est du continent, le groupe souhaite également développer ses activités en Afrique de l’Ouest, où il a déjà participé avec succès à plusieurs projets d’envergure, au premier rang desquels l’oléoduc Tchad-Cameroun, inauguré le 12 juin. Le regard des dirigeants se porte à présent vers le golfe de Guinée, où se trouvent les gisements les plus intéressants. Petronas, qui ne dispose pas pour l’instant d’une technologie suffisante pour exploiter seul les gisements en eaux profondes, doit opérer en partenariat. « Nous sommes prêts à partager les risques avec d’autres sociétés, explique Hashim. Dans le secteur énergétique, les sociétés sont à la fois concurrentes et partenaires. Et les majors, qui travaillent avec nous depuis trente ans en Malaisie, nous font confiance. »

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