Olivier Poivre d’Arvor

Directeur de l’Association française d’action artistique

Publié le 5 juillet 2004 Lecture : 3 minutes.

« J’ai envie que l’Afrique soit à la mode, qu’on ne puisse plus se réclamer de la création contemporaine sans avoir vu ou organisé quoi que ce soit en rapport avec ce continent ! » Lorsqu’il parle de l’Afrique, le directeur de l’Association française d’action artistique (Afaa) s’enthousiasme. Olivier Poivre d’Arvor, philosophe de formation, frère cadet du très médiatique Patrick avec qui il a cosigné plusieurs ouvrages sur les aventuriers des mers – Coureurs des mers – et des airs – Courriers de nuit -, a fait ses classes d’animateur culturel dans les ambassades et les instituts français à Alexandrie, Prague et Londres. Depuis, on le trouve plus souvent à Dakar ou à Pékin qu’à Paris. Il n’en est pas moins venu expliquer longuement, au siège de la rédaction de Jeune Afrique/l’intelligent, la mise en place, l’an prochain, d’une série de manifestations de première importance pour l’Afrique en Europe.

C’est une grande exposition d’art contemporain qui tiendra la vedette. Intitulée Africa Remix, coproduite par Jean-Hubert Martin, du musée de Düsseldorf, et Simon Djami, directeur du programme « Afrique en créations » de l’Afaa, elle offrira pendant trois mois, à partir de mai 2005, une rétrospective des trente dernières années de création plastique africaine au Centre Pompidou, avant de se poursuivre à Londres. Dans le même temps sera présentée dans un autre lieu prestigieux de la capitale française une sélection de photos provenant de la dernière biennale de Bamako. Des images géantes de l’Afrique seront projetées sur les frontons de monuments parisiens. Il y aura aussi des concerts, des spectacles de danse, la publication d’un livre-catalogue, sans oublier les quelques surprises que J.A.I. réservera à ses lecteurs.

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« Nous soutenons plusieurs autres grands événements : la biennale de la photographie à Bamako et celle de danse contemporaine à Antananarivo (Madagascar), le festival Dak’Art d’art moderne de Dakar, mais aussi le Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb) et le Masa de Côte d’Ivoire ». C’est de ce côté que le bât blesse. Le bouillant directeur de l’Afaa n’est pas du tout satisfait – c’est un euphémisme – des pièces de théâtre qu’il voit depuis quelques années. « Je vais partout et je suis toujours déçu. Le niveau est médiocre ! Alors qu’il y a une trentaine de festivals sur le continent et quelque 750 compagnies répertoriées, c’est dramatique », assène-t-il.
Ne serait-ce pas reconnaître implicitement que l’Afaa faillit à sa mission en faveur de la création contemporaine africaine sur son propre continent ? Qu’elle pourrait investir davantage dans des programmes de formation ? « Oui, nous devons mettre en place une chaîne formation-production-diffusion pour, d’ici à deux ou trois ans, disposer, par exemple, de textes nouveaux et pouvoir monter des spectacles dans des conditions décentes. » Une idée ambitieuse, qui risque de se heurter rapidement à des problèmes de financement. Poivre d’Arvor le sait : l’école de théâtre itinérante qu’il avait essayé de mettre en place il y a quelques années n’a trouvé aucun partenaire. Ni parmi les États africains, ni avec l’Union européenne ou des fondations-mécènes. Le Nord, c’est-à-dire les festivals français comme celui d’Avignon ou de Limoges, juge mauvais le théâtre africain et se refuse à en acheter les réalisations. Ce dernier ne peut donc progresser, faute des moyens qui proviennent habituellement de la vente des spectacles. Que faire ?

Olivier Poivre d’Arvor n’aime pas parler de ce qui ne va pas. Il préfère achever sa visite à Jeune Afrique sur une note optimiste, évoquer par exemple son projet de « Transsaharienne », un regroupement d’artistes et d’intellectuels des dix ou douze pays qui se partagent le désert du Sahara. Pendant quinze jours, chaque année, ils s’installeront à Agadez, à Gao, à Chinguetti ou à Tamanrasset et convieront le public à une série d’entretiens, d’expositions et de spectacles. Voilà qui est bien ambitieux, mais cette ambition n’est-elle pas la première des qualités d’OPA ? « Je déteste la notion de « naufrage africain », avoue-t-il, je préfère être afroptimiste. » Encore une bonne idée…

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