Du bon usage des pétrodollars

Tripoli rejette les recommandations des experts du Fonds monétaire international en matière de gestion des revenus de l’or noir.

Publié le 6 juin 2006 Lecture : 2 minutes.

Comment la Libye doit-elle dépenser les pétrodollars – 98 % des recettes en devises – amassés depuis 2004 à la faveur de la flambée du baril ? Investir dans les infrastructures sociales de base ? Rembourser avant terme sa dette extérieure, même si elle n’en a pratiquement plus ? Consommer davantage ? Épargner ?
La gestion d’une telle manne fait en tout cas l’objet d’un désaccord entre le Fonds monétaire international (FMI) et Tripoli. Dans un rapport daté du 10 avril rendant compte d’une mission en Libye, les experts du FMI recommandent au gouvernement de créer un Fonds d’épargne et de stabilisation chargé de faire fructifier les surplus en lieu et place du Fonds de réserve et du Fonds d’investissement. Une recommandation adressée à nombre de pays exportateurs de pétrole pour éviter la dilapidation des excédents observée lors des précédents booms pétroliers de 1973-1976 et de 1978-1981.
Dans le cas de la Libye, cette manie dépensière a repris. Les importations de biens se sont élevées à 8,8 milliards de dollars en 2004 (+ 22 % par rapport à 2003) et ont connu un nouveau pic à 10,9 milliards de dollars en 2005 (+ 24 %). L’excédent de la balance des paiements courants est passé de 7,3 milliards de dollars en 2004 à 16 milliards en 2005. Et pourrait atteindre 19,6 milliards en 2006. Le FMI accepte qu’une partie des surplus soit allouée aux dépenses publiques pour investir davantage dans les infrastructures sociales de base et améliorer ainsi le niveau de vie des Libyens. De fait, le budget 2006 a augmenté de 17 %. En outre, le gouvernement a exceptionnellement affecté quelque 3 milliards de dollars à des prêts subventionnés destinés à la construction de logements, ou pour lancer de petits projets ou des fermes. « Mais ces dépenses, avertit le FMI, doivent tenir compte de la capacité d’absorption de l’économie. » Or les hydrocarbures représentant 68 % du PIB en 2005, cette capacité d’absorption est limitée par le niveau insuffisant des investissements et de la croissance (4,5 % par an en moyenne entre 2006-2010).
Mais les autorités libyennes ne semblent guère enthousiasmées par la manière dont les experts du FMI conçoivent la gestion de ce Fonds. Car ces derniers estiment que les investissements publics doivent être financés directement par le budget de l’État, que le Fonds ne doit investir qu’à l’étranger et qu’il « devra être géré par des règles strictes qui devront être totalement appliquées ». Ce qui revient à demander l’impossible aux dirigeants libyens, les revenus du pétrole étant jusque-là gérés comme une affaire de famille par Kadhafi et ses lieutenants.

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