L’avant-garde russe

Comme il l’avait fait douze ans plus tôt en Russie, Renaissance Capital a décidé de miser sur l’Afrique avant les autres.

Publié le 5 mai 2008 Lecture : 3 minutes.

À moins de cinquante ans, Zéphirin Diabré a un parcours déjà bien rempli. Deux fois ministre au Burkina, ex-numéro deux du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), actuel président pour l’Afrique et le Moyen-Orient du groupe français Areva, il vient d’ajouter une corde à son arc. Il a été officiellement nommé, au mois d’octobre dernier, au tout nouveau « Conseil stratégique africain » créé par le groupe financier Renaissance, aux côtés de diverses personnalités comme Linda Chalker, ministre britannique des Affaires étrangères pendant une dizaine d’années, ou Kwesi Botchwey, ancien ministre des Finances du Ghana. L’aréopage aura pour mission de déterminer la stratégie de Renaissance en Afrique et de l’aider à bâtir son image. Nouveau venu, encore peu connu hors de Russie, où il est né en 1995 (voir encadré), le groupe Renaissance s’est lancé un défi extrêmement clair : devenir la première banque d’investissement réellement africaine, en se positionnant sur le continent avant les autres, comme il l’a fait douze ans plus tôt en Russie. Et ce dans tous les métiers du groupe : l’intermédiation boursière, le conseil en levée de fonds ou en fusion-acquisition, la gestion d’actifs et l’investissement pour compte propre.
À la tête de Renaissance (dont il est devenu depuis le principal actionnaire), Stephen Jennings, convaincu des très fortes perspectives de développement de son groupe, demande à ses hommes de relever le challenge au début de 2006. Dès février, il acquiert 7,4 % du capital d’Ecobank. Mais Jennings ne souhaite pas se limiter à ce seul investissement, et le dit publiquement : « L’Afrique est aujourd’hui une opportunité unique pour la croissance du groupe, comme l’a été la Russie à nos débuts. »

Une image de « cow-boy »
En quelques mois, et sous la férule de son président Afrique, le britannico-zimbabwéen Neil Harvey, le groupe planifie son développement sur le continent. Il entre au capital « de 15 à 20 sociétés, avec une assez forte présence au Nigeria », explique Neil Harvey, et affirme son intérêt pour les services financiers, la distribution, les matériaux de construction, l’immobilier et les ressources naturelles. Dès janvier 2007, Renaissance ouvre un bureau à Nairobi (Kenya) et un autre à Lagos (Nigeria). Au mois d’avril, il lève avec JPMorgan 300 millions de dollars à l’international pour la banque nigériane UBA. En juillet, il permet à une autre institution financière de Lagos – Access Bank – de lever le même montant. À la fin d’août, il décroche un siège à la Bourse de Nairobi. Au début de novembre, il lance le fonds d’investissement Renaissance Africa Fund, doté initialement de plus de 100 millions de dollars, apportés par des investisseurs internationaux. En 2008, il prévoit d’ouvrir des bureaux en Côte d’Ivoire et peut-être au Cameroun… Dans le même temps, ?Renaissance recrute à tout-va, débauchant chez Standard Bank, Deutsche Bank, Afrinvest, Investec ou Citibank C’est peut-être de là que lui vient l’image sulfureuse de « premier cow-boy » africain, qui lui colle déjà à la peau. Et c’est sans doute, aussi, l’origine des tensions apparues depuis son entrée au capital d’Ecobank et sa supposée intention d’en prendre le contrôle – ambition démentie à plusieurs reprises par Renaissance. « Ils sont très secrets », commente un capital-investisseur. « Il est vrai qu’il y a chez Renaissance un certain manque de transparence. Il faut s’y faire », ajoute un ancien employé. En Russie, le groupe bénéficie pourtant d’une réputation de confiance. « Ils ont une très bonne réputation locale et beaucoup de banquiers très expérimentés », confirme James Longdon, qui suit l’activité banque d’investissement du groupe pour l’agence de notation internationale Fitch.

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