Ça swingue à Ouaga
Le festival de jazz de la capitale burkinabè, qui s’est tenu du 25 avril au 3 mai, est en passe d’asseoir sa renommée. Reste à le transformer en rendez-vous populaire.
Le 25 avril dernier, le coeur de la cotton belt africaine a, une nouvelle fois, pris des airs de Nouvelle-Orléans. Ce jour-là, le dernier-né d’une longue lignée de griots fait vibrer le Centre culturel français Georges-Méliès de Ouagadougou. Sous le ciel étoilé de la capitale burkinabè, Ba Cissoko et ses musiciens revisitent la musique mandingue de leur Guinée natale, au son de leurs koras électriques et de leurs percussions. Dans les gradins, le public, qui attend le groupe depuis trois ans, se met à danser, redoutant avec anxiété le moment où les voix et les instruments vont se taire définitivementÂ
Qu’à cela ne tienne pourtant : à quelques encablures seulement, la terrasse du Nirvana, un bar-restaurant réputé de la Cité An III, prolonge les festivités jusqu’au bout de la nuit. Choisie pour son ambiance simple et détendue, elle héberge, cette année, le « village » de Jazz à Ouaga, seizième du nom. Anita Freeman, les Woody, Mike del Ferro, Ray Lema, Bil Aka Kora ou le Raaga Trio : tour à tour, les invités du festival s’y produisent, pour ne pas redescendre sur terre trop brutalementÂ
Seize ans après sa création par un petit groupe d’amateurs français expatriés au Burkina, le succès de Jazz à Ouaga ne se dément pas. Mieux : désormais dotée d’un budget de 90 millions de F CFA (137 000 euros), la manifestation est en passe de devenir un rendez-vous musical majeur en Afrique de l’Ouest. À Ouaga, d’aucuns n’hésitent d’ailleurs plus à en faire l’un des trois événements les plus attendus dans la sous-région, après le Festival panafricain de cinéma et de télévision (Fespaco) et le Salon international de l’artisanat (Siao)Â
Démocratiser le genre
« Au début, le festival pouvait durer jusqu’à deux mois, car nous étions tributaires des disponibilités des artistes que nous invitions. Mais aujourd’hui, ce sont eux qui se bousculent pour venir jouer chez nous ! » s’enthousiasme Abdoulaye Diallo, le secrétaire général de l’association Jazz à Ouaga. Du Malien Ali Farka Touré au Camerounais Richard Bona, les plus grands noms du blues et de la world music continentale s’y sont succédé. « En ouvrant l’événement à des artistes venus de divers horizons, l’objectif est de démocratiser le genre. Trop souvent perçu comme une musique élitiste, il s’agit de faire sortir le jazz du cercle d’initiés dans lequel il reste confiné », poursuit Diallo.
Le décollage de Jazz à Ouaga remonte à il y a dix ans exactement. Repris, à l’époque, par une petite dizaine de bénévoles burkinabè, ces derniers décident, dans un premier temps, de le doter d’une identité forte. C’est alors que la date d’ouverture du festival est fixée au dernier vendredi d’avril de chaque année Dans un second temps, ses nouveaux promoteurs s’attachent à en accroître l’envergure.
En 2000, deux déclinaisons locales – à Bobo-Dioulasso et Koudougou – voient le jour, puis, l’an dernier, une « caravane » chargée « d’amener le jazz au village », dixit Diallo. Devenu grand, le festival tient toutefois à rester fidèle à son objectif initial : se faire plaisir sans se ruiner. Loin du coupé-décalé et de son star system qui a envahi la région, il demeure, rappelle Diallo, « un état d’esprit avant tout. Ici, on n’est pas show-biz, on n’est pas là pour faire du fric ! » Les businessmen du saxo sont prévenusÂ
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