Relations de bon voisinage

Publié le 5 avril 2004 Lecture : 3 minutes.

Dix ans après le changement de régime intervenu en juillet 1994 à Kigali, les relations du Rwanda avec ses proches voisins et, plus largement, avec les autres pays africains, ont radicalement changé. Conséquence de la nouvelle donne géopolitique dans la région des Grands Lacs, la diplomatie rwandaise a noué des contacts avec de nouveaux interlocuteurs, que ce soit dans son environnement immédiat ou, plus largement, sur la scène africaine. Avec les États frontaliers, par exemple, le réchauffement des relations est flagrant. C’est notamment le cas avec la RD Congo, avec laquelle Kigali a signé un accord de paix le 30 juillet 2002. Depuis cette date, la normalisation est en marche. À la fin du mois d’octobre dernier, le ministre rwandais des Affaires étrangères, Charles Murigande, s’est rendu à Kinshasa. Et son homologue congolais, Antoine Ghonda, a annoncé son intention de lui rendre la politesse.

La décrispation entre les deux capitales est également sensible au niveau des chefs d’État. Depuis décembre dernier, les présidents Joseph Kabila et Paul Kagamé se parlent régulièrement au téléphone. Enfin, le 4 mars, le gouvernement rwandais a nommé un ambassadeur en RDC. C’est à Antoine Munyakazi Juru que revient la tâche de rouvrir la représentation diplomatique de Kigali à Kinshasa. Un signe de bonne volonté de la part du Rwanda, qui a retiré ses troupes de l’est de la RDC en octobre 2002 à la suite de la signature de l’accord de Pretoria. Même si les autorités rwandaises regrettent la lenteur de la démobilisation des rebelles hutus toujours présents dans cette région.
Autre voisin, autre contentieux : l’Ouganda. Bien qu’il ait longtemps été l’allié de Kampala, Paul Kagamé entretient depuis quatre ans des relations difficiles avec l’Ouganda. Toutefois, les relations avec son homologue Yoweri Museveni semblent également s’améliorer. Après un début d’année 2003 très tendu, notamment en raison de violents combats dans l’Ituri, province située à l’est de la RDC, les tensions se sont apaisées. Symbole s’il en est du début d’un dégel, le président ougandais a même assisté en personne à l’investiture de Paul Kagamé le 12 septembre dernier.
En raison de son enclavement, le Rwanda entretient des contacts très suivis avec les autres pays d’Afrique de l’Est, en particulier la Tanzanie et le Kenya. Les ports de Dar es-Salaam et Mombasa lui permettent d’accéder à la mer, et Nairobi exerce un leadership économique incontestable sur la sous-région. Avec le Kenya, le temps a également permis de faciliter les choses. Après avoir nourri des rapports conflictuels avec le président Daniel arap Moi, accusé par le Front patriotique rwandais d’avoir donné l’asile à certains génocidaires, Kigali s’est finalement rapproché de son voisin kényan et entretient aujourd’hui des relations très courtoises avec le régime de Mwai Kibaki, élu à la tête de l’État le 27 décembre 2002.
Par sa proximité avec la Communauté est-africaine (CEA, dont sont membres le Kenya, l’Ouganda et la Tanzanie), Kigali regarde résolument vers l’océan Indien, même si son patrimoine historique, linguistique et culturel lui confère indéniablement des attaches très fortes en Afrique centrale. Reste que le littoral est-africain est plus facile d’accès que peuvent l’être les ports du golfe de Guinée. Moins attiré par l’Atlantique, le Rwanda renforce en revanche son ancrage en direction de l’est et du sud du continent. Tout comme la RD Congo et le Burundi, il est membre du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Comesa), dont l’objectif est d’instaurer une zone de libre-échange entre les pays signataires. Enfin, Kigali multiplie les échanges commerciaux avec l’Afrique du Sud et accueille des investisseurs en provenance de Johannesburg.

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À la charnière de deux Afrique, le Rwanda tente donc de tirer profit de cette position stratégique. L’appartenance à deux zones d’influence peut conduire à des choix contradictoires. À moins que l’on considère cette situation comme une chance. C’est d’ores et déjà le cas pour les étudiants rwandais, qui considèrent le trilinguisme – kinyarwanda, anglais et français – comme un atout.

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