Reconstruction au forceps

Grâce au soutien militaire des Nations unies, le crime organisé commence à reculer, mais l’autorité de l’État est loin d’être restaurée.

Publié le 5 mars 2007 Lecture : 2 minutes.

Au lendemain de son élection à la tête du pays, en mai 2006, René Préval s’attaque au problème de l’insécurité. Des territoires entiers de la république étaient tombés sous le joug des gangs depuis le départ mouvementé de Jean-Bertrand Aristide du pouvoir, en février 2004. Trafic de drogue, vols, enlèvements, les bandes prospèrent et prolifèrent en l’absence de l’État, au bord de la faillite. Jouant l’apaisement, le nouveau président décide de négocier avec les représentants de ces groupes, dont certains faisaient office, à l’occasion, de milices armées pour le compte de son prédécesseur. Mais les discussions n’aboutissent pas.
Rien ne semblait pouvoir arrêter la violence, jusqu’à ce que l’ONU vole au secours de cet agronome de 64 ans, qui représente désormais le seul espoir de stabilisation du pays. L’organisation a proposé un programme de désarmement : toute personne qui rend une arme aux autorités se voit proposer une formation professionnelle avec, à la clé, un emploi. L’initiative ne suscite pas d’enthousiasme à Cité Soleil, un bidonville de 200 000 habitants de Port-au-Prince et zone de non-droit tenue par les gangs. Face au crime, qui fait fuir à la fois investisseurs et touristes, l’option du recours à la force finit par s’imposer. On assigne pour mission à 6 700 soldats sud-américains, jordaniens et népalais, appuyés par des policiers chinois, de démanteler les organisations criminelles. Les forces de la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah) reprennent progressivement Cité Soleil et d’autres places fortes de la criminalité haïtienne.
Parallèlement, l’ONU soutient l’État dans l’effort de reconstitution de ses forces de défense et de police. Au regard de ses besoins, Haïti dispose actuellement d’un nombre nettement insuffisant de policiers : 6 000 seulement, pour une population de 8,5 millions d’habitants. Pour renforcer ces effectifs, 500 agents sortent tous les six mois de l’école de police tenue par l’ONU. À l’image des forces de maintien de l’ordre, le système judiciaire haïtien a lui aussi besoin d’une réforme en profondeur. Selon l’International Crisis Group, 96 % des détenus de la principale maison d’arrêt de Port-au-Prince sont en attente de jugement. Les efforts des bailleurs de fonds, qui ont déjà commencé à financer cette réforme, tardent à porter leurs fruits. Quant au Parlement, il discute encore de l’opportunité d’une augmentation du salaire mensuel des juges, actuellement compris entre 200 et 500 dollars.
Outre la criminalité, d’autres problèmes non moins urgents attendent d’être réglés, comme l’extrême insalubrité dans les villes. Même avec l’aide internationale (65 % du budget national), l’État ne parvient pas à assurer toutes ses missions régaliennes, ni à créer des emplois, encore moins à relancer la machine économique. Les importants transferts d’argent opérés par les migrants sont un complément salutaire mais encore insuffisant. Sur le plan énergétique, l’État serait asphyxié si les approvisionnements en pétrole n’étaient pas subventionnés par le Venezuela.

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