Cercle vertueux

Véritable relais entre les citoyens et le pouvoir, l’« ombudsman » de la République prêche la bonne gouvernance auprès de la population.

Publié le 5 mars 2007 Lecture : 2 minutes.

A Kigali, entre deux affiches multicolores vantant les mérites d’un produit, les passants peuvent lire des slogans loin des impératifs commerciaux : « Toute forme de corruption est nuisible », « Justice et corruption ne peuvent cohabiter. Choisissons la justice ! » Derrière ces messages se cache Tito Rutaremara. La soixantaine, le front haut, le visage cerné par une barbe blanche coupée court, ce patriarche baroudeur à la taille imposante inspire le respect. Ancien député, ex-président de la Commission juridique et constitutionnelle, on dit de lui qu’il est intègre et très influent. Autant de bonnes raisons de lui confier l’une des fonctions les plus importantes du pays : ombudsman, médiateur de la République.
À la tête d’une équipe de trente-six personnes, Tito Rutaremara s’évertue, depuis près de quatre ans, à imposer la bonne gouvernance dans tout le pays. « La bonne gouvernance, c’est un État qui fonctionne selon des lois, les respecte et les applique », explique-t-il.
Tito Rutaremara reçoit les citoyens, récolte leurs doléances et tâche de trouver une solution à leurs problèmes. Il peut s’agir, par exemple, d’un administré qui ne parvient pas à rencontrer un membre du gouvernement. Le médiateur décroche alors son téléphone, contacte le ministre concerné et essaie d’obtenir un rendez-vous. Plus généralement, les préoccupations ont trait aux questions foncières, à l’habitat, aux jugements rendus lors de procès, à l’emploi, aux arriérés de salaires. « Aujourd’hui, les choses changent, confie le médiateur. En 2004, nous avons dû régler 7 000 cas, tous problèmes confondus. Il y en a eu 4 000 en 2005 et seulement 964 en 2006. Désormais, nous sommes de moins en moins saisis. Les conflits sont réglés à l’amiable. »
Tito Rutaremara dispose également de quatre unités mobiles qui se déplacent à travers le pays. Pendant trois jours, ses équipes rencontrent à tour de rôle les responsables locaux, la société civile et la population. Tous les litiges sont examinés et tranchés en public, excepté les affaires pour lesquelles la justice est saisie d’emblée. Le quatrième jour, les membres de l’équipe s’entretiennent avec les enfants pour leur transmettre les valeurs morales qui doivent les guider tout au long de leur vie. « Nous voulons apprendre aux gens à résister à la corruption et à l’injustice, et à ne plus craindre les autorités, affirme l’« ombudsman ». Ainsi, quand ils rencontreront un problème ou seront les témoins d’une pratique illégale, ils s’adresseront directement aux autorités ou à la police. » Le bureau du médiateur effectue également des missions dans les différents services de l’État – hôpitaux, laboratoires, dispensaires, etc. – pour s’assurer de leur bon fonctionnement.
Mais la prévention n’exclut pas la répression. Selon le médiateur de la République, rien ne saurait légitimer les malversations de toutes sortes. « Chercher les origines de la corruption, c’est atténuer la faute, clame-t-il, implacable. Quand on est corrompu, on est corrompu. » Lorsque la culpabilité des suspects est établie, l’ombudsman leur inflige des sanctions administratives, tout en laissant à la justice le soin de régler les affaires plus complexes. Tito Rutaremara a une conviction : « Dans d’autres pays, les gens sont capables de refuser l’injustice et la corruption. Pourquoi pas chez nous ? Avec un peu de volonté politique, tout est possible. Avoir des lois sans aucune volonté politique ne sert à rien. »

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