Renaissance germanique

Publié le 5 février 2007 Lecture : 3 minutes.

Depuis le début des années 2000, la planète cinéma a vu sa géographie se modifier considérablement. C’est évident pour le Sud, où l’on a vu émerger ou réémerger des cinématographies pour le moins discrètes comme celles de l’Argentine, de la Corée, de la Chine et de l’Afrique du Sud ou du Maroc. C’est aussi vrai pour le Nord, où on assiste à la renaissance du septième art dans de nombreux pays de l’Est européen – Roumanie en tête – et surtout en Allemagne, où le secteur est resté longtemps sinistré.
Ce retour au premier plan du cinéma allemand est avant tout le fait de réalisateurs qui ont décidé de traiter des sujets sur l’histoire récente du pays dans des films certes destinés au grand public mais de qualité. Ainsi, en 2003, Good-Bye Lenin ! racontait de façon amusante comment sa famille, pour ne pas la traumatiser, cachait pendant des mois à une femme, à peine sortie d’un long coma, la chute du mur de Berlin et la disparition de l’Allemagne de l’Est. Six millions de spectateurs avaient assuré un triomphe à cette habile comédie. En 2004, c’est La Chute, un récit des derniers jours de Hitler fondé sur les mémoires de sa secrétaire particulière présentant un Führer abject mais à visage humain, qui avait atteint les sommets du box-office avec 4,5 millions d’entrées. En 2005, pour citer un dernier exemple, Sophie Scholl, l’histoire authentique d’une résistante qui fut condamnée à mort pour avoir distribué des tracts contre les nazis à l’université en 1943, a dépassé le cap du million.
Aujourd’hui, toujours dans cette veine politique et historique, sort sur les écrans de nombreux pays, après un vif succès en Allemagne (2 millions de spectateurs), La Vie des autres, le meilleur des films récents de ce type. Il raconte comment un officier de la Stasi, l’implacable police politique de l’Allemagne de l’Est, surveille la vie intime d’un écrivain considéré comme « orthodoxe » mais qui fréquente des opposants au régime et a pour compagne une actrice célèbre dont le ministre de la Culture entend obtenir les faveurs. Et surtout comment ce policier zélé mais idéaliste, une fois au courant de tous les aspects de la vie de sa cible et de son entourage, bascule : ce qu’il entend (la musique qu’écoutent les « suspects », leurs histoires d’amour, la qualité de leurs discussions, leur culture) lui fait comprendre que sa mission est inique et que sa vie ne vaut rien comparée à celle de ces « autres ». Jusqu’à une fin subtile que nous ne dévoilerons pas.
Ce long-métrage de Florian Henckel von Donnersmarck – un coup de maître pour un premier film – est à la fois complexe et très facile à suivre, politique mais aussi sentimental, avec de grandes qualités documentaires – sur la Stasi et ses méthodes notamment tout en gardant un rythme de thriller. Il est emblématique de cette « nouvelle qualité allemande » qui caractérise aujourd’hui le cinéma du pays d’Angela Merkel. Il ne représente cependant qu’un volet de cette renaissance. Car le « pur » cinéma d’auteur est également très dynamique entre le Rhin et la Baltique, en particulier dans la capitale où l’on parle déjà d’une « école de Berlin ». Dans cette catégorie, on peut également mentionner Ping-Pong, de Matthias Luthardt (sorti à Paris le 24 janvier) : l’histoire des émois amoureux d’un adolescent qui vont détruire l’harmonie factice d’une famille où il a trouvé refuge. Un long-métrage, encore un premier film, qui témoigne de la vitalité d’une cinématographie retrouvée.

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