Les fantassins de la Chinafrique

Publié le 5 février 2007 Lecture : 2 minutes.

Parmi leurs nombreuses qualités, les Chinois ont celle d’apprendre vite. Confrontés aux premières vagues de critiques émanant de leurs partenaires africains (compagnies mises en cause dans la déforestation au Gabon et au Congo, destruction des emplois locaux par l’invasion de leurs produits en Afrique du Sud, au point que le président Thabo Mbeki a dû les mettre en garde contre le développement de relations « de type colonial ») et aux premières difficultés sur le terrain (ressortissants enlevés au Nigeria et braqués au Cameroun), les dirigeants de Pékin ont rapidement réagi. Le respect de l’environnement, le souci de ne pas voir leurs exportations systématiquement décriées comme un facteur de chômage et même les règles élémentaires de la bonne gouvernance font désormais partie intégrante de leurs discours. Certes, on continue de commercer avec le pouvoir en place, quel qu’il soit, sans se mêler de ses affaires intérieures – mais on lui pose tout de même quelques questions. Ainsi au Soudan, où Hu Jintao a conseillé au président Béchir une « solution diplomatique » du conflit du Darfour
Cette réactivité, le gouvernement chinois la doit au professionnalisme de ses spécialistes du continent, qui ont vite compris le danger d’une image de marque renvoyant à l’exploitation des richesses naturelles de l’Afrique par les ex-empires coloniaux. Qui sont ces messieurs (et mesdames) Afrique de Pékin ? Édité fin 2006 par le Groupe Indigo publications, un document les identifie avec précision. Placée sous la houlette de deux vice-ministres des Affaires étrangères, Zhai Jun et Lu Guozeng (ancien ambassadeur en Tunisie), la politique africaine de la Chine relève de la responsabilité quotidienne de deux femmes. La première, Xu Jinghu, directrice générale du département Afrique au MAE (département lui-même divisé en sept sections régionales) a été en poste au Gabon et à Madagascar et s’occupe du continent depuis le début de sa carrière. La seconde, Li Liqing, est en quelque sorte son équivalent au sein du Parti communiste chinois, dont elle dirige le quatrième bureau du département des relations extérieures auprès du Comité central. Les affaires sensibles (renseignement, sécurité, coopération militaire) relèvent, elles, des prérogatives d’un « poids lourd » de l’exécutif chinois : Wu Guanzheng, numéro sept du régime et spécialiste de la question, qui a fait, fin août 2006, une très discrète tournée sur le continent.
Une armée de diplomates, qui, pour la plupart, ont fait l’essentiel de leur carrière sur le continent, entrecoupée de séjours au département Afrique du MAE, sont les yeux et les oreilles de Pékin. Signe des temps : ils n’hésitent plus à sponsoriser les entreprises chinoises dans les capitales où ils sont accrédités. Les affaires pétrolières sont gérées depuis Londres, où les trois majors (CNPC, Sinopec et Cnooc) ont installé leurs bureaux Afrique. Quant aux télécoms, autre secteur clé de l’expansion chinoise sur le continent, c’est à partir de l’Afrique du Sud que se développent leurs activités. Huawei et ZTE, les deux surs ennemies de Shenzen, ont ainsi établi leur QG à Johannesburg. Un ordre de bataille qui fait peur aux Occidentaux. « La révolution, disait Mao, n’est pas un dîner de gala. ». Et le commerce encore moins.

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