Côte d’Ivoire, la détente

Après une décennie de crise, les chiffres de la croissance en Côte d’Ivoire sont prometteurs et les signes de détente sur le front politique se multiplient.

Marwane Ben Yahmed est le directeur de publication de Jeune Afrique. © Vincent Fournier/JA

Marwane Ben Yahmed est le directeur de publication de Jeune Afrique. © Vincent Fournier/JA

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Publié le 11 février 2014 Lecture : 3 minutes.

Du 29 janvier au 1er février, Abidjan a accueilli le quatrième Forum international des investissements en Côte d’Ivoire (Investir en Côte d’Ivoire, ICI 2014), quinze ans après la dernière édition. Près de 2 000 participants, hommes d’affaires, opérateurs économiques et acteurs institutionnels venus de plus d’une cinquantaine de pays auront l’occasion de mesurer concrètement le chemin parcouru par la première puissance de l’UEMOA (et deuxième de la Cedeao, après le géant nigérian) depuis l’accession au pouvoir d’Alassane Ouattara, en mai 2011.

Après une décennie de crise, les chiffres bruts sont, en tout cas, prometteurs : 9,8 % de croissance en 2012, et des taux du même ordre prévus pour 2013 et 2014. L’enjeu est de taille car, au-delà du marché ivoirien lui-même (24 millions d’habitants, un revenu national brut par tête de 1 800 dollars – 1 328 euros – par an), c’est toute l’Afrique de l’Ouest et ses 300 millions de consommateurs qui sont visés. Car Abidjan a l’ambition de devenir le hub et la porte d’entrée de la sous-région. Mais la concurrence est rude…

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Mantra très en vogue sur le continent, l’ »émergence » nécessitera beaucoup plus que de longs discours.

Les profils du chef de l’État mais aussi de son Premier ministre, Daniel Kablan Duncan – qu’il aurait d’ailleurs voulu à ses côtés plus tôt -, laissaient présager que le développement économique serait leur priorité. Objectif : rejoindre les rangs des pays émergents à l’horizon 2020. Mantra très en vogue sur le continent, notamment en Afrique centrale, l’ »émergence » nécessitera beaucoup plus que de longs discours.

Les conditions de sa réalisation, qui semble tout de même peu probable en un temps aussi limité compte tenu des nombreux défis à relever, sont d’ailleurs peu ou prou les mêmes que celles qui inciteront les investisseurs à miser sur la destination ivoirienne : potentiel économique, évidemment – mais en la matière tout le monde reconnaît dans le pays d’Houphouët un marché d’avenir important -, mais aussi stabilité, sécurité, infrastructures, connexion au monde extérieur, climat des affaires favorable, secteur bancaire efficace, ressources humaines disponibles et compétentes, etc.

Une économie performante et surtout pérenne a également besoin d’un environnement politique sain. De démocratie et de justice. D’un dialogue fécond entre pouvoir et opposition et d’un projet de société au sein duquel la plupart des Ivoiriens pensent pouvoir trouver leur place. De mémoire, aussi, pour tirer les leçons de vingt années ou presque de tensions et bannir les comportements qui ont abouti à la descente aux enfers de la terre d’Éburnie.

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Or pour la première fois depuis maintenant deux ans et demi, nous assistons à de réels signes de détente entre les deux camps qui se sont affrontés dans les urnes puis à balles réelles fin 2010-début 2011. Le temps commence à faire son oeuvre : les vainqueurs du conflit postélectoral ne se sentent plus autant menacés par leurs adversaires, ceux qui ont soutenu Laurent Gbagbo avant mais surtout après sa folle tentative de se maintenir au pouvoir. Et ces derniers commencent enfin à se projeter vers l’avenir et à l’envisager sans leur icône.

Un dialogue a été engagé avec le Front populaire ivoirien (FPI), qui commence à porter ses fruits depuis août 2013 et la libération de quatorze caciques du régime Gbagbo, dont le président de son parti, Pascal Affi Nguessan. Le retour d’exil de l’ancien directeur du port d’Abidjan, Marcel Gossio, proche parmi les proches de Gbagbo, pour « participer à la réconciliation nationale » comme il l’a expliqué, et le transfert dans la capitale économique de douze officiers militaires détenus sans procès dans le nord du pays depuis la chute de leur mentor, illustrent cette décrispation et la nouvelle phase politique dans laquelle la Côte d’Ivoire semble entrer. Une excellente nouvelle pour tous les Ivoiriens. Et un signe que les haruspices de l’économie que sont les investisseurs ne pourront qu’interpréter favorablement…

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