Les îles Marshall font-elles partie des États-Unis ?

Question posée par René Tramier, Antibes, France

Publié le 5 janvier 2004 Lecture : 3 minutes.

Les îles Marshall viennent de fêter l’anniversaire de leur indépendance. Voilà treize ans qu’elles se sont libérées du joug des États-Unis, depuis le 22 décembre 1990 exactement. La République micronésienne n’en est pas moins restée fidèle à son ancien administrateur. Preuve en est : elle s’est systématiquement alignée sur les États-Unis, en votant contre les résolutions de l’Organisation des Nations unies (ONU) condamnant la politique d’Israël.
Situé dans l’océan Pacifique, à 3 200 km à l’ouest de Hawaii, ce micro-État compte quelque 1 550 îlots, essaimés sur une zone maritime de la taille du Niger (1,3 million de km2). L’archipel est divisé en deux grands groupes : les îles Ratak (« du Levant ») et des îles Ralik (« du Couchant »). Mais, mises bout à bout, les îles Marshall sont à peine aussi grandes que la ville de Washington D.C. (181 km2) et aussi peuplées que Hyères, en France (53 000 habitants). Pourtant, selon le principe des Nations unies, leur poids politique est identique à celui des autres pays membres de l’Organisation, ce qui en a fait récemment un allié tout à fait honorable pour l’Amérique de George W. Bush.
Depuis septembre 1991, date de leur entrée à l’ONU, les îles Marshall ont fait preuve d’une grande timidité diplomatique. Il est vrai que les autorités de Majuro, la capitale, ont plus souvent connu, au cours de leur histoire, la sujétion que l’autonomie.
Conquis par l’Espagnol çlvaro de Saavedra en 1526, l’archipel doit en fait son nom à un Anglais : le capitaine John Marshall, qui l’a exploré en 1788. Mais les Anglais ne s’y sont pas installés. Ce qui a permis aux Espagnols de s’approprier les îles avant de les vendre aux Allemands, en 1899, pour 25 millions de pesetas. L’Allemagne y établit plusieurs comptoirs commerciaux afin d’exporter la coprah. Un commerce lucratif mais de courte durée puisque le traité de Versailles, qui entérine la fin de la Première Guerre mondiale, prive la nouvelle République de Weimar des îles Marshall. Ce sont les Japonais qui en héritent jusqu’en 1944, date à laquelle ils en sont chassés par les marines américains. L’ONU, qui vient de voir le jour, confie ensuite l’administration des îles aux États-Unis, dans le cadre du Trust Territory of the Pacific Islands (1947). Une aubaine pour la superpuissance qui procède, en pleine guerre froide, entre 1946 et 1958, à de nombreuses expériences atomiques sur cet archipel isolé, notamment sur les atolls de Bikini et d’Eniwetok.
Les habitants ne se révoltent pas, même s’ils militent pour adopter leur propre Constitution et fonder leur République. Le 1er mai 1979, leur premier voeu est exaucé : ils se dotent d’une Constitution qui prévoit l’élection tous les quatre ans d’un président par un Parlement monocaméral de trente-trois députés. Partisans de la politique du « donnant-donnant », les Américains installent trois ans plus tard une véritable base militaire à Kwajalein, tout en promettant d’assurer la défense des îles puisqu’elles sont dépourvues d’armée. Ce n’est pas tout : ils déboursent 2 millions de dollars pour indemniser les habitants des expériences nucléaires. Un geste insuffisant aux yeux des îliens, lesquels plébiscitent un pacte de libre-association, finalement adopté en 1986.
Cela dit, le micro-État reste largement tributaire des États-Unis, dont ils ont d’ailleurs adopté la monnaie, la religion (protestantisme) et la langue – en plus des langues locales malayo-polynésiennes. L’économie des îles s’appuie sur l’agriculture (cocotiers, coprah, arbres à pain…), la pêche et la vente de pavillons de complaisance. La République des îles Marshall, dirigée depuis le 3 janvier 2000 par Kessai Hesa Note, lequel vient d’être réélu pour quatre ans, vit toutefois essentiellement du tourisme… et des subventions américaines – qui représentent 70 % de son budget. Son indépendance politique est donc plus formelle que réelle, du moins sur la scène internationale. Ainsi, à l’ONU, quand les États-Unis se rangent derrière Israël qui agresse les Palestiniens à Jérusalem et dans les Territoires occupés (octobre 2000), qui autoproclame la Ville sainte capitale du pays (décembre 2002) ou encore qui veut expulser le président de l’Autorité palestinienne, Yasser Arafat (septembre 2003), les îles Marshall suivent…

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