Hémorragie cérébrale

Pourquoi les chercheurs transalpins disent « arrivederci ! ».

Publié le 5 janvier 2004 Lecture : 2 minutes.

Les chercheurs italiens désertent leur pays. Manque de moyens, gel des embauches, salaires trop bas, lourdeurs bureaucratiques : les raisons du désenchantement sont nombreuses. Et le gouvernement de Silvio Berlusconi n’envisage pas d’y remédier de sitôt. Il vient en effet d’annoncer la reconduction des restrictions infligées depuis trois ans à la recherche. De quoi alimenter la colère des scientifiques, dont un nombre important menacent de s’expatrier.
Le phénomène de la fuite des cerveaux date des années 1960, mais atteint aujourd’hui des proportions alarmantes. Chaque année, 5 % des 180 000 diplômés italiens quittent le pays, contre 1 % en moyenne dans le reste de l’Union européenne (UE)… La plupart s’envolent pour les États-Unis, dont les alléchantes perspectives de carrière font un véritable eldorado scientifique. Là-bas, l’avancement est réputé être lié au mérite et aux compétences, plutôt qu’à l’ancienneté ou aux accointances politiques. En Italie, « certains des grands pontes universitaires ne sont pas intéressés par les résultats des recherches. Ils cherchent avant tout à accroître leur pouvoir », constate amèrement Claudia Di Giorgio dans son ouvrage L’Exportation des cerveaux (AdnKronos Libri, 2003). Conséquence de cette rigidité « semi-féodale » : le secteur vieillit.
Mais comment les jeunes docteurs pourraient-ils envisager leur avenir en Italie de manière optimiste quand le gouvernement ne consacre que 1 % du PIB à la recherche, soit deux fois moins que les autres pays de l’UE ? Pourquoi se contenter d’un salaire équivalent à celui d’une nourrice – environ 1 000 euros par mois -, quand ils peuvent gagner trois fois plus ailleurs ?
Régulièrement, des scientifiques s’alarment de cette situation dangereuse pour l’avenir du pays. En 2002, la troisième économie d’Europe n’a enregistré que 61 brevets quand les autres pays de la zone en déposaient 125 en moyenne, et les États-Unis 312 ! Son industrie devient, de ce fait, plus vulnérable à la concurrence de pays émergents, comme la Chine, qui fait déjà vaciller l’hégémonie du textile italien. Ces mauvais résultats ont inquiété le vice-président du Conseil, le nationaliste Gianfranco Fini. « Investir dans la recherche n’est pas un luxe dont nous pouvons nous passer », a-t-il récemment déclaré devant une assemblée de scientifiques.
Pour l’heure, à défaut de créer des emplois, le gouvernement tente d’inciter les chercheurs à revenir au pays, en leur promettant, par exemple, un abattement fiscal de 90 % ! Silvio Berlusconi projette également de créer un institut de technologie, auquel serait alloué 1 milliard d’euros au cours des dix prochaines années. Le président de la République Carlo Azeglio Ciampi, qui répète à l’envi qu’« il faut aider les jeunes chercheurs à partir et à tirer les avantages d’une expérience à l’étranger, mais [qu’]il faut aussi les aider à revenir », propose, quant à lui, d’investir 100 millions d’euros dans la création d’emplois.

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