Tunis est dans le vent

Forte d’une première expérience réussie, la société nationale d’électricité prévoit la création de trois nouveaux parcs éoliens d’ici à deux ans.

Publié le 4 décembre 2006 Lecture : 3 minutes.

Sidi Daoud, près d’El-Haouaria, à la pointe nord-ouest du cap Bon. En cette fin octobre, les pales des quarante-quatre éoliennes qui font face aux îles Zambra et Zambretta sont à l’arrêt. « C’est qu’ici on travaille au gré du vent, explique Mansour el-Hadj, le chef de la centrale. En ce moment, la vitesse du vent est de 2 mètres par seconde. Or la production d’énergie ne commence qu’à partir d’une vitesse de 4 mètres par seconde. Au-delà de 25 mètres par seconde, la machine s’arrête aussi parce qu’elle ne peut pas supporter une telle vitesse. » Sur ce site, les vents peuvent atteindre une vitesse de 30 à 35 mètres par seconde. Mais, contrairement aux préjugés, il n’y a statistiquement pas de saisons plus ventées que d’autres. « Nous comptons 6 650 heures de vent en moyenne par an, explique Abdelwahed Trabelsi, chef du projet. Cela équivaut à environ 75 % du temps. Les 25 % restants, comme aujourd’hui, représentent la période de calme non productif. » Toute la centrale est informatisée, du sommet de l’éolienne à la salle de contrôle en passant par la connexion avec le réseau national. Le fonctionnement, lui, ne nécessite qu’un personnel restreint, qui se compte sur les doigts d’une main.
Mise en service en 2000, la première tranche comprend trente-deux machines totalisant une puissance de 10 mégawatts. Venu inaugurer la centrale, le président Zine el-Abidine Ben Ali a encouragé son extension : douze nouvelles éoliennes sont venues porter la puissance totale à 20 mégawatts. Une deuxième extension prévoit l’arrivée, en novembre 2007, de vingt-six nouvelles machines, qui apporteront 35 mégawatts supplémentaires.
Othman Ben Arfa, président de la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (Steg), se félicite de l’expérience pilote de Sidi Daoud : « Malgré le coût élevé de l’investissement, environ deux fois supérieur à celui que nécessite un cycle combiné, la Steg est parvenue à obtenir un kilowatt/heure (kWh) éolien à un prix compétitif, nettement inférieur à celui habituellement proposé par les opérateurs privés. » Comment ? « Par la conjugaison de plusieurs facteurs : outre l’optimisation technico-économique du projet et des coûts d’exploitation et de maintenance réduits, le recours à des financements préférentiels a permis de limiter sensiblement le montant du projet. » La Steg a en effet obtenu des crédits dont le remboursement s’étale sur quarante-trois ans, après un délai de grâce de vingt-quatre ans, avec un taux d’intérêt minime (0,1 %). Les gains d’exploitation sont évidents, puisque le vent servant de combustible est gratuit et renouvelable. « Pour une puissance de 20 mégawatts, déclare Othman Ben Arfa, l’économie totale en combustible depuis la mise en service de la centrale est de 55 000 tonnes-équivalent pétrole (tep), soit une économie de 17 millions de dinars. Les émissions de dioxyde de carbone évitées sont de 140 000 tonnes, soit l’équivalent des émissions annuelles de 30 000 voitures. »
Face au succès de Sidi Daoud, la Steg vient de lancer un appel d’offres pour la construction de centrales éoliennes sur trois sites – Métline, Kchabta et Ben Aouf -, dans la région de Bizerte (Nord-Est). La mise en exploitation est prévue pour 2008-2009. Capacité : 120 mégawatts. La part de la production éolienne dans le total national passera de 1,14 % en 2007 à 4 % à partir de 2009. Ce qui n’est pas négligeable quand on sait que ce taux est de l’ordre de 2 % en moyenne en Europe de l’Ouest et de 0,5 % en Amérique du Nord. À l’horizon 2009, les 175 mégawatts de l’éolien tunisien permettront d’économiser 13 400 tep et d’éviter l’émission de 330 000 tonnes de CO2.
Mais il faut garder à l’esprit que l’éolien ne peut se substituer aux énergies fossiles et qu’il est seulement une énergie complémentaire, sauf dans le cas d’une résidence très éloignée du réseau de distribution. « L’intégration de l’éolien dans le système électrique national, signale le président de la Steg, doit tenir compte du caractère aléatoire du vent, des creux de la demande (notamment la nuit), des caractéristiques du parc de production conventionnel et des paramètres du réseau. La capacité éolienne totale installée d’ici à 2009 correspond, de l’avis des experts, à la puissance maximale que le réseau national pourra intégrer à cet horizon. Au-delà, le parc éolien sera développé en fonction de l’évolution du système électrique national. Nous recherchons de nouveaux sites et réfléchissons aussi à l’exploration de sites éoliens, en offshore si nécessaire. »

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